Pascal Denis, Partner & Head of Advisory Services, Member of the Executive Committee – KPMG Luxembourg

« 96% des CEO luxembourgeois interrogés au cœur de cette étude menée par un organisme indépendant voient la disruption technologique davantage comme une opportunité que comme une menace », commente Pascal Denis. La perception de nos dirigeants vis-à-vis de la capacité du digital à transformer les modèles économiques a fortement évolué ces dernières années et est désormais alignée avec celle des autres dirigeants à travers la planète. « Cependant, cette vision optimiste doit être contrebalancée par l’aveu de difficultés, pour les CEO luxembourgeois, à gérer en parallèle des aspects digitaux et non-digitaux », poursuit l’associé. En effet, 68% des dirigeants luxembourgeois déclarent avoir du mal à appréhender les deux dimensions de front, alors qu’ils ne sont que 49% à l’échelle du Benelux et seulement 30% au niveau global. « Le challenge est donc ressenti plus intensément ici qu’ailleurs. Cela est sans doute dû aux particularités du marché, plus petit que d’autres, et très orienté vers le B2B, précise Pascal Denis. Ce constat met aussi en lumière, sans doute, un certain effet de rattrapage. Le business au Luxembourg connaissait un réel retard dans le domaine du digital par rapport à ce qui se fait dans d’autres pays. Désormais, il y a une véritable accélération dans la prise de conscience des enjeux par les patrons. La transformation est maintenant bien engagée et le Luxembourg rattrape rapidement son retard. »

 

Les garanties de la confiance

D’après l’enquête réalisée, l’appréhension des dirigeants luxembourgeois vis-à-vis du digital se traduit au travers de deux grands défis. Le premier concerne la cybersécurité. Interrogés sur leur capacité à pouvoir faire face à une cyber-attaque, seuls 40% des CEO luxembourgeois se montrent plutôt positifs, contre 56% au niveau global. « N’étant pas en confiance, il est normal que les dirigeants appréhendent les canaux digitaux. Cela traduit un manque de préparation de nos acteurs en comparaison à l’ensemble des organisations à travers la planète », précise Pascal Denis. Un autre défi, lui partagé par l’ensemble des dirigeants dans le monde, réside dans l’acquisition des compétences. « 44% disent vouloir acquérir de nouveaux profils, de nouvelles compétences pour relever les enjeux du digital, explique le Partner. En tête des profils recherchés, des spécialistes en cybersécurité, puis des spécialistes des technologies émergentes et, en troisième position, des data scientists. » Rappelons qu’en la matière, il s’agit de la vision des CEO, et non forcément des leaders digitaux au cœur de l’entreprise. « Ces informations, toutefois, constituent de bons indicateurs pour les CIO, qui seront amenés à soutenir les CEO vis-à-vis des défis à venir. En pouvant mieux comprendre leurs préoccupations et les défis business, ils pourront les aider à prioriser les actions », souligne Pascal Denis.

 

La data, un réel enjeu

L’étude révèle quelques autres éléments intéressants dont, notamment, la plus faible importance accordée à la donnée au Luxembourg qu’ailleurs. Quand 32% des CEO à l’échelle globale envisagent de recourir davantage à la data analytics et à des modèles prédictifs dans les trois prochaines années, ils ne sont que 20% au Luxembourg. 68% estiment avoir négligé les indications issues de leurs données dans leurs prises de décision au cours des trois dernières années. D’autre part, 52% affirment que leur organisation est en mesure d’évaluer son retour sur investissement dans le digital, tandis qu’ils sont 79% au niveau global. « Si l’on étudie les types d’investissements envisagés, 20% des CEO luxembourgeois se tournent vers des projets dans le domaine de la robot process automation. C’est un sujet très business, qui émerge chez nous. Dans ce secteur, le Luxembourg progresse rapidement et rattrape son retard », explique Pascal Denis. Enfin, le sujet qui rassemble les CEOs luxembourgeois a trait à la protection des données. « 72% d’entre eux considèrent que la protection des données clients constitue une de leurs responsabilités les plus importantes, contre 59% ailleurs », poursuit Pascal Denis.

 

Soutenir l’investissement

Pour l’associé de KPMG, il est important de soutenir l’accélération révélée à travers cette étude. « Il faut continuer à investir, tant au niveau du privé que du public, dans la formation, dans l’infrastructure, dans des projets concrets, assure-t-il. Si les dirigeants luxembourgeois semblent moins préparés que les autres à travers le monde, ils sont aujourd’hui conscients de l’importance du défi de la transformation digitale. »