Alors que l’on parle beaucoup d’intelligence artificielle, quel regard portez-vous sur ces évolutions technologiques ? 

D’abord soyons honnêtes, je constate un petit effet « buzz word ». C’est l’expression du moment, le thème qui doit être abordé dans tout article ou tout event. Certains décrivent l’Intelligence Artificielle comme une évolution, voire une révolution, tandis que d’autres vont même jusqu’à parler de disruption. Une chose est sûre : l’Intelligence Artificielle, et plus encore l’IA « générative », jouera rapidement un rôle majeur dans la société et le monde de l’entreprise, avec un impact systématique sur la productivité et sur la performance.  

Au niveau du secteur de l’assurance, je pense que l’intégration de cette technologie va jouer un rôle crucial dans la conception de produits d’assurance vie innovants. Les assureurs pourront exploiter les capacités de l’Intelligence Artificielle notamment pour l’évaluation des risques, la personnalisation des offres et l’amélioration de l’expérience client. 

Mais avant de se lancer à corps et fonds perdus dans cette technologie, il est crucial, d’une part, de bien appréhender les capacités de cette technologie et, d’autre part, de les « mapper » avec les besoins de l’entreprise. Il faut aussi garder à l’esprit que l’intégration de cette technologie et en particulier sa déclinaison IA « générative » nous demande de relever de nouveaux défis notamment en matière de confidentialité des données et de transparence. 

Comment envisagez-vous son intégration à l’échelle des organisations ?

L’idée n’est pas de faire de l’Intelligence Artificielle pour faire de l’Intelligence Artificielle mais de chercher à l’intégrer progressivement, en opérant selon le principe du « Try & fail », sur la chaîne de valeur en identifiant pour cela des use cases précis, en adéquation avec les enjeux de l’Entreprise. L’Intelligence Artificielle est un appui qui va libérer du temps pour des missions à plus haute valeur ajoutée. De même, l’intégration de l’IA « générative » dans les outils digitaux de relation vient améliorer l’expérience client.

Toutefois je scinderais son intégration en deux volets. Le premier concerne l’Intelligence Artificielle standard.

Notre vision est que cette technologie a délivré aujourd’hui des produits aboutis et fiables permettant de délivrer des résultats probants rapidement.

Sur la base de ce constat, nous avons analysé avec la collaboration forte des métiers les zones de la chaîne de valeur en souffrance, les morceaux de process trop manuels ou fastidieux et les irritants.  Ceci nous a permis d’identifier une liste de cas d’usages potentiels pour l’utilisation de cette technologie. Ces cas d’usage ont été pondérés en fonction de la valeur ajoutée de l’apport de l’Intelligence Artificielle, de la complexité de déploiement et du risque à faire pour nous permettre de déterminer une série de cas pilotes. Ceux-ci sont en cours d’expérimentation pour d’une part appréhender la technologie et notre maîtrise de celle-ci et d’autre part travailler l’encadrement et la gouvernance. L’objectif sera ensuite de mettre en production ces modules, d’éventuellement les décliner sur d’autres périmètres et d’en expérimenter d’autres cas.

Le second volet l’IA « générative ». 

Quels sont les enjeux relatifs à l’intégration de cette technologique ? 

Concernant ce second volet et donc cette (r)évolution en matière d’Intelligence Artificielle, notre Groupe, avec le soutien de son Comité de Direction Générale, avait lancé en 2023 une initiative dans leur lab’ autour de six grands piliers à savoir : 

• Gérer les risques inhérents à l’IA « générative » ;

• Communiquer et acculturer les collaborateurs, vulgariser ce sujet qui peut être complexe, expliquer les bénéfices de cette technologie ;

• Appréhender les besoins des différentes directions métiers pour répondre à leurs usages ;

• Identifier les impacts sur les organisations de l’entreprise (nouveaux profils techniques, nouvelles compétences…) ;

• Avec qui travailler ? Sélectionner les acteurs partenaires dans un monde technologique qui va très vite ;

• Expérimenter. Tester les technologies et commencer la construction de briques technologiques pour déployer des cas d’usage.

Fort du succès de cette initiative, il a été décidé de créer des instances par grandes directions métiers afin de poursuivre plus concrètement les expérimentations au départ de cette technologie. Nous sommes heureux au sein de La Mondiale Europartner d’avoir été choisis comme l’une de ces entités tests et de pouvoir bénéficier prochainement de cette instance dédiée qui nous permettra aussi d’appréhender cette technologie à la lumière des contraintes réglementaires luxembourgeoises, notamment en matière de la confidentialité des données.

Comment la place de l’humain va-t-elle évoluer ? Comment réengager l’humain et le collectif (l’intelligence collective) au service de la création de valeur ?

D’abord il faut se rappeler que La Mondiale Europartner a construit son programme de transformation autour de trois axes : la transformation du business, la transformation des outils et des process et, enfin, la transformation humaine et culturelle. 

Ce troisième axe est crucial et est la pièce maîtresse de la réussite de notre transformation. Nous avons donc, dès le départ, veillé à embarquer nos collaborateurs dans nos réflexions. Surtout, nous avons travaillé la question du sens dans notre démarche et notre stratégie afin que chaque employé comprenne nos décisions et perçoive le lien entre ses actions propres, ses objectifs et les enjeux stratégiques de l’entreprise. Les équipes RH ont accompagné le Comité de Direction et les managers dans divers travaux autour des valeurs, de la culture du feed-back, des objectifs SMART et du développement des compétences. Les travaux ont ensuite porté sur le collectif et les « power skills » afin de faire naître des collectifs, porteurs ensemble des enjeux de l’entreprise ; le tout saupoudré d’agilité.

Lorsque nous avons initié les travaux sur l’Intelligence Artificielle, nous avons pu tirer profit des bénéfices culturels mis en place grâce à cette nouvelle structure. D’une part les collaborateurs se sont montrés curieux et ouverts à appréhender cette nouvelle technologie et d’autre part, ils ont, de manière constructive dans une approche d’amélioration continue, recherché les zones à privilégier pour la phase d’étude des cas d’usage.