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« L’IA peut contribuer à fidéliser les talents »

Dans le cadre de notre série « H.APP.Y employees thanks to IT », Christine von Reichenbach, Directrice adjointe et CIO de l’Agence pour le développement de l’emploi (ADEM), nous explique comment la technologie, en plus d’augmenter la satisfaction des employés, peut également aider les organisations à fidéliser leurs collaborateurs.

May 2, 2023

De votre point de vue, comment la technologie peut-elle contribuer à la satisfaction des employés ? 

La satisfaction des employés est cruciale pour la réussite d’une organisation. Pour l’améliorer, la technologie peut être utile à plusieurs niveaux. Tout d’abord, les applications métier modernes qui offrent une ergonomie accrue, une utilisation intuitive et un support de processus plus fluide, permettent aux employés de se concentrer sur les tâches qui apportent une véritable valeur ajoutée à l’organisation.

De plus, l’utilisation intelligente des outils d’IA ouvre la voie à l’automatisation des tâches répétitives et peu valorisantes. Pour les employés qui sont client-facing, cette utilisation intelligente a l’avantage de livrer un service encore plus adapté aux besoins de leurs clients, notamment via des outils de support décisionnel. Les employeurs peuvent également utiliser l’IA pour mesurer la satisfaction de leurs collaborateurs et détecter les employés susceptibles de quitter l’organisation, ce qui peut améliorer la rétention et la satisfaction des employés. En ces temps de lutte acharnée pour attirer et retenir les talents, cela peut donner un avantage compétitif.

Les employeurs peuvent également utiliser des outils d’analyse de données pour mesurer et améliorer la productivité des employés, sans pour autant enfreindre les lois sur la surveillance abusive. En identifiant les goulots d’étranglement et les problèmes potentiels, ils peuvent agir de façon proactive et fournir des ressources supplémentaires ou des outils de formation pour aider les employés à améliorer leurs performances. En utilisant correctement ces outils, les employés peuvent se sentir soutenus et encouragés, à même de travailler plus efficacement et, par ce biais, voir leur satisfaction professionnelle augmenter. 

Enfin, la technologie offre des avantages plus généraux, tels que la traduction basée sur les outils AI de type deepl.com ; un atout dans un pays comme le Luxembourg où de nombreuses langues cohabitent. Le travail à distance, facilité par des applications et des processus métier modernes permettant aux employés de mieux concilier vie professionnelle et vie personnelle, peut aussi mener à une plus grande satisfaction au travail. En outre, les outils de communication et de collaboration en ligne sont à même d’augmenter la productivité, par exemple par le co-authoring sur les documents en temps réel. Quant aux formations en ligne pour les employés, elles leur offrent la possibilité d’améliorer leurs compétences et connaissances à leur propre rythme, pour les aider à être plus performants dans leur travail et à se sentir plus épanouis dans leur carrière.

 

À l’échelle de votre organisation, l’IT est-elle mobilisée autour des enjeux de satisfaction des collaborateurs ? Pouvez-vous évoquer certains projets mis en œuvre autour de ces enjeux ?     

Dans le cadre de notre stratégie ADEM 2025, nous avons prévu une grande initiative de transformation digitale qui sera mise en œuvre à travers une nouvelle application pour notre cœur de métier :  eADEM. Développée en suivant une approche innovante, client-centric, elle permettra à l’ADEM d’améliorer ses interactions avec ses clients, et transformera profondément ses méthodes de travail dans les années à venir. Dans ce contexte, nous souhaitons concevoir, mettre en œuvre, déployer et exploiter une architecture d’applications qui remplacera progressivement nos anciennes applications. Le projet se fait en étroite collaboration avec le Centre des technologies de l’information de l’État (CTIE) qui est notre fournisseur principal de services informatiques.

Pour concevoir eADEM, nous utilisons des personnages fictifs appelés “personae”. Certains de ces personnages représentent nos utilisateurs internes, ce qui nous permet de mieux comprendre leurs besoins, leurs défis quotidiens et les éventuelles frustrations qu’ils pourraient ressentir dans leur travail. Grâce à cette approche, nous pouvons mesurer leur satisfaction et livrer une solution informatique mieux adaptée, pour augmenter leur productivité et soutenir leur épanouissement professionnel.

Pour la future solution informatique eADEM, les aspects suivants sont cruciaux et devraient augmenter la satisfaction de nos agents :

  • Convivialité : tous les agents de l’ADEM et les utilisateurs externes, tels que les demandeurs d’emploi et les employeurs, n’ont pas le même niveau de maturité numérique. C’est pourquoi il est essentiel que la future solution s’accompagne d’un environnement de travail attrayant et convivial, permettant à nos clients, d’une part, d’interagir de manière transparente avec nous, via un portail client auto-explicatif (« MyADEM », un portail transactionnel dédié et intégré dans la dernière version de MyGuichet), et aux conseillers de l’ADEM, d’autre part, de se concentrer sur la qualité de la relation client et des services fournis. La nouvelle plateforme nous donnera – dans la limite de ce qui est réaliste et souhaitable par rapport à la fonction de chaque agent – de vastes possibilités de travail et de collaboration à distance avec des collègues. Tout en bénéficiant d’une grande ergonomie, d’une facilité d’utilisation contribuant à la satisfaction de nos utilisateurs.
  • Straight-through processing (STP) : pour contribuer à la dynamique du marché de l’emploi, nous proposons le STP à nos clients employeurs, pour les déclarations de postes vacants (offres d’emploi). Nous disposons d’une interface logicielle (API) facile à utiliser pour l’importation directe des annonces d’emploi, dont la déclaration est obligatoire auprès de l’ADEM. Cela permet à nos clients employeurs de se conformer beaucoup plus facilement à leurs obligations légales. En interne, cela réduit le besoin de saisies et de contrôles de saisies, fastidieux et peu valorisants. Ainsi, nos agents du Service Employeurs peuvent davantage se consacrer à leurs missions apportant une vraie valeur ajoutée pour nos clients employeurs, comme le conseil personnalisé et la recherche de candidats pour les postes déclarés.
  • Chat- et mailbots : utiliser des chatbots ou des assistants virtuels pour répondre rapidement aux questions des utilisateurs et offrir un service 24/7 pour décharger les agents des questions répétitives. Ce projet se fera avec le support de l’initiative AI4GOV de Digital Luxembourg. AI4GOV nous procure les fonds et le soutien nécessaires permettant à nos agents de découvrir et d’expérimenter les technologies AI afin que nos agents puissent par la suite mieux servir nos clients.
  • Profiling et matching : utiliser l’intelligence artificielle et l’analyse de données pour améliorer les processus de profiling, de sélection et de placement des demandeurs d’emploi. Ici également, notre projet AI profiling est soutenu par l’initiative AI4GOV.

L’IT pourrait également permettre la mise en place de systèmes de suivi de la satisfaction des employés et des outils d’analyse de données, pour comprendre comment les employés utilisent les technologies de l’entreprise et comment elles affectent leur satisfaction au travail. En fonction des résultats, nos équipes IT pourraient proposer des ajustements pour améliorer l’expérience numérique des employés et renforcer leur satisfaction au travail.

Finalement, des formations pour les agents étatiques, comme « Elements of AI », proposée en collaboration avec l’INAP et l’Université du Luxembourg, sont très utiles pour aider nos agents à maîtriser les bases de l’IA. De telles formations leur permettront de mieux comprendre le fonctionnement des outils émergents qui deviendront courants dans les années à venir. 

   

Quelles sont les grandes révolutions technologiques qui affecteront le travail des collaborateurs à l’avenir ? 

A ce niveau, j’identifie notamment les tendances suivantes :

  • L’automatisation et l’IA : l’automatisation et l’IA ont déjà commencé à transformer certains emplois et devraient continuer à le faire à l’avenir. Pour les collaborateurs de l’ADEM, cela permet d’abord de se décharger de tâches répétitives et à faible valeur ajoutée, comme mentionné précédemment. À l’avenir, les personnes maîtrisant de façon efficace les outils d’IA seront plus compétitives que celles qui ne les maîtrisent pas, car ils disposeront d’une plus grande efficacité dans leur travail quotidien.
  • Le Big Data : l’IA a besoin d’un grand volume de données pour apprendre et améliorer les processus de prise de décision. De ce fait, il existe une grande synergie entre l’IA et le Big Data. Grâce à cette synergie, les organisations peuvent tirer parti des capacités avancées d’analyse, telles que l’analyse augmentée ou prédictive, pour obtenir des informations exploitables à partir de vastes stocks de données. L’analyse du Big Data alimentée par l’IA permet également de favoriser une culture des données dans toute l’organisation, ce qui fournit de nombreux avantages aux organisations. Si cela est bien implémenté, les collaborateurs, en utilisant les données Big Data et les systèmes IA, deviennent plus autonomes, voire rassurés, dans leur prise de décision.
  • La réalité augmentée et la réalité virtuelle : ces technologies permettent de créer des expériences immersives et interactives qui peuvent être utilisées pour la formation, la résolution de problèmes et même pour l’amélioration de l’expérience client. Cependant, leur adoption à grande échelle pour le travail quotidien pourrait poser des défis liés à la fatigue visuelle et à la distraction. À ce stade, je ne vois pas encore de maturité suffisante pour une utilisation à grande échelle, en raison de problèmes de performance et de stabilité de beaucoup de ces solutions. Les prochaines années nous permettront d’y voir plus clair, quand les problèmes seront résolus.
  • Les technologies de suivi et d’analyse : ces technologies peuvent aider les employeurs à suivre les performances et le comportement des employés, mais elles peuvent également soulever des préoccupations en matière de vie privée et de surveillance excessive. Pour éviter cela, il convient de préconiser une approche où les personnes mesurent leur performance individuellement, en établissant une comparaison basée sur la moyenne de leurs pairs ou en se positionnant dans une liste, sans pour autant que ne soient révélées les identités des autres membres de l’équipe.  C’est déjà souvent le cas pour les applications fitness sur les smartphones. Nous pourrions nous en inspirer.

Pour veiller à une intégration réussie de ces technologies qui contribuent effectivement au bien-être des collaborateurs, il faut, selon moi, impliquer les collaborateurs dès le début du projet, les former, s’assurer que les technologies sont bien adaptées aux besoins des employés et évaluer régulièrement l’impact des technologies sur le bien-être des employés. En suivant ces actions, les entreprises peuvent intégrer les nouvelles technologies de manière efficace et responsable, tout en préservant le bien-être de leurs employés.



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