HUMAN
La bonne résolution de Pascal Steichen
"La diplomatie, au sens classique du terme, recouvre l’ensemble des pratiques permettant à divers États d’entretenir des relations plus ou moins cordiales et, surtout, d’éviter la guerre. Le concept de « cyberdiplomatie » est, quant à lui, utilisé pour évoquer les discussions entre États, les acteurs privés, ainsi que la société civile, visant à établir une gouvernance et des normes communes du cyberespace."
April 22, 2025

“Cette année, nous célébrons les 20 ans du Sommet mondial sur la société de l’information (WSIS+20). Lors de cet événement, quelque 175 pays s’étaient accordés sur un ensemble de principes visant l’édification d’une société de l’information à dimension humaine, inclusive et privilégiant le développement.
La société de l’information, dont le socle commun est Internet, est désormais au cœur de notre vie. C’est sur cet espace numérique, partagé par tous, que repose la transformation numérique de nos organisations et de pans entiers de notre quotidien. C’est également là que se déroulent désormais la plupart de nos échanges. À l’heure où le monde connaît d’importants bouleversements, cet espace n’est évidemment pas exempt de menaces, et il y a lieu de s’inquiéter de ce qui pourrait l’altérer ou le dénaturer.
La gouvernance du cyberespace fait, depuis des années, l’objet de nombreuses discussions. Les échanges entre gouvernements en la matière mettent en lumière deux approches distinctes de la cyberdiplomatie. Quand l’Occident paraît avant tout préoccupé par la préservation des infrastructures techniques supportant Internet, l’Est, pour sa part, semble davantage craindre les pratiques et jeux de manipulation de l’opinion que permet cet espace d’échange en raison de la libre propagation des contenus.
Ces dernières années, de vastes campagnes de manipulation de l’opinion ou de désinformation, soutenues par de grandes puissances en vue d’influencer les résultats de scrutins électoraux, nous font prendre conscience des risques en la matière. Cependant, donner les clés à des régimes autoritaires pour réguler le contenu diffusé sur Internet pourrait constituer une arme plus dangereuse encore, leur permettant de faire taire certaines minorités et de renforcer leur autorité. On peut aussi craindre de voir ce cyberespace se scléroser en raison de l’instauration de contrôles ou de filtres sur le contenu dans certaines régions, par exemple.
Jusqu’à présent, les discussions entre États sur le sujet n’ont jamais abouti en raison d’une absence de consensus sur ce que l’on souhaite réglementer.
Si, effectivement, Internet peut être le terrain de pratiques condamnables, comme la fraude ou la manipulation, il est aussi un outil magnifique favorisant l’inclusion, le partage culturel et l’accès à la connaissance, permettant à chacun de se développer et de grandir. Le réel enjeu de la cyberdiplomatie, aujourd’hui, doit être de veiller à préserver l’universalité de l’Internet en garantissant l’accès libre à ce cyberespace au plus grand nombre.
La cyberdiplomatie ne doit pas être uniquement l’affaire des gouvernements. S’il faut pouvoir définir des règles d’usage et de gouvernance de ce cyberespace, il est surtout très important que celles-ci soient établies en tenant compte des intérêts de l’ensemble des parties prenantes, selon le modèle du « multi-stakeholders ». Il appartient aux acteurs privés, mais aussi aux représentants de la société civile, de se saisir du sujet et d’exprimer clairement ce qu’ils souhaitent pour ce cyberespace.”