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La bonne inspiration de Marie-Amélie Le Fur

Lors de la cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques de Paris 2024, cet été, Marie-Amélie Le Fur figurait parmi les dernières personnalités sportives du relais de la flamme. Cette ancienne athlète française peut se targuer d’avoir obtenu 9 médailles, dont trois en or… aux Jeux Paralympiques à Pékin, Londres, Rio et Tokyo. Le parcours de celle qui est aujourd’hui présidente du Comité paralympique et sportif français est un modèle de résilience.

September 17, 2024

Alors qu’elle pratiquait l’athlétisme depuis l’âge de 6 ans, qu’elle projetait de devenir sapeur-pompier professionnelle, ses rêves vont s’effondrer en 2004. Âgée de 15 ans, elle est victime d’un accident de la route. Amputée de sa jambe gauche, elle se remet à courir quatre mois plus tard, trouvant dans le sport un moyen nouveau d’exprimer ses capacités et de se dépasser… jusqu’à décrocher les titres les plus convoités. Aujourd’hui, Marie-Amélie s’est fixé de nouveaux défis en tant que dirigeante, oeuvrant à une plus grande inclusion des personnes souffrant d’un handicap dans le sport et, plus largement dans la société. Avec nous, elle évoque son parcours, l’importance du sport dans la vie de chacun, l’opportunité de porter un autre regard sur le handicap, dans une dynamique d’inclusion au profit de tous.

« Le sport, pour se reconstruire au-delà du handicap »

Comment le sport est-il entré dans votre vie ?

J’ai commencé l’athlétisme à l’âge de 6 ans. Au départ, j’accompagnais avant tout ma grande sœur. Très vite, le sport s’est imposé dans mon projet de vie, avec ses valeurs. La compétition, le désir de progresser, l’envie de se dépasser, mais aussi le lien social que l’on développe, la possibilité de faire des rencontres à travers la pratique sportive sont devenus essentiels pour moi. J’y prenais beaucoup de plaisir. Pour autant, à l’époque, je ne rêvais pas d’être championne olympique. Mon ambition professionnelle, étant jeune, était de devenir sapeur-pompier. C’était alors mon principal projet de vie.

Puis, à 15 ans, un accident vient anéantir vos projets….

Oui. Cet accident va tout faire basculer. Avec lui s’éteint totalement cette possibilité d’embrasser une carrière de pompier au service de la communauté. Le sport va alors prendre une importance nouvelle dans ma vie, et cela malgré la situation de handicap dans laquelle je me suis retrouvée.

L’accident, qui a entrainé l’amputation de votre jambe gauche sous le genou, ne devait pourtant pas laisser beaucoup d’espoir de renouer avec le sport… Comment y êtes-vous revenue ?

En effet, du jour au lendemain, vous vous retrouvez dans une situation de handicap. À l’époque, au sein de la société française, une telle situation ne vous laissait pas beaucoup d’espoir. Autour de vous, l’accent est davantage mis sur les difficultés que représente votre situation, l’incompétence découlant de votre handicap. En permanence, on vous renvoie à vos incapacités. Dans mon cas, cela a effectivement cassé mon rêve de devenir pompier. Et après ? Je vais me rendre compte que, malgré la situation, je peux faire encore énormément de choses, et ce en dépit du message que m’envoyait la société. La pratique sportive va m’aider à me reconstruire, à me comprendre, à connaître ce nouveau corps, à en repousser les limites. Elle va me permettre d’accepter ma situation, de continuer à garder confiance en moi. J’ai pris conscience que j’avais encore plein de potentiel et qu’il était important de l’exploiter.

Vous reprenez le sport quatre mois, jour pour jour, après l’accident… Quel exemple de résilience ! Qu’est-ce qui vous a incité à reprendre aussi rapidement ?

On peut parler d’un alignement favorable de planètes. C’est en tout cas comme cela que je le vois. D’abord, j’avais conscience que cela était possible. Un an auparavant, en effet, je me trouvais au stade de France, en tant que spectatrice des championnats du monde d’athlétisme. À cette occasion, j’ai pu assister à une démonstration d’une course par des hommes amputés. Quand, un an plus tard, on commence à me parler d’amputation, ce souvenir constitue une ouverture pour moi, j’y vois une possibilité de pouvoir retrouver le sport. Le deuxième facteur qui a été déterminant, c’est la présence de mes proches, de mes parents, de ma sœur, de mon entourage, qui ont tout de suite cru dans le projet. Ils n’ont pas cherché à me dissuader, à me mettre des barrières, considérant les difficultés que cela pouvait représenter. Au contraire, ils m’ont pris par la main, ils m’ont accompagné et, ensemble, on a œuvré pour faire bouger les lignes, passer les obstacles, souvent contre l’avis des médecins ou d’autres personnes qui estimaient que c’était trop tôt, qu’on allait trop vite.

À l’époque, les possibilités de pratiquer le sport quand on est en situation de handicap ne devaient pas être aussi accessibles qu’aujourd’hui…

Non, en effet. Mais il y avait une volonté d’y aller. Avec ma famille, nous étions unis. Il y avait une envie de concrétiser ce projet. Mais si je parle d’alignement des planètes, c’est aussi en raison d’un troisième élément déterminant et, pour le coup, atypique. Tout s’est en effet accéléré grâce à ma participation au tournage d’un téléfilm dans lequel je devais être la doublure de l’actrice principale (Julie Depardieu, NDLR), dont le personnage était une personne amputée qui souhaitait courir comme une athlète. La réalisatrice a pris connaissance de ma situation, de ma volonté de courir. Mais pour y parvenir, il fallait que je dispose d’une prothèse adaptée. C’est le film qui va me permettre d’utiliser cet équipement et qui va me l’offrir au terme du tournage. Cela a permis de nous affranchir de la contrainte financière que représentait l’achat de ce matériel sportif, les lames (le nom des prothèses portées par les athlètes paralympiques) n’étant pas remboursées en France.

Le téléfilm, au fond, racontait votre histoire ?

Oui, en effet, c’est cocasse. Quand j’ai été contactée et que j’ai découvert le synopsis, on s’est dit que c’était mon histoire que l’on portait à l’écran. Cela résonnait étrangement avec ce qui m’étais arrivé et ce que je vivais. Je ne suis cependant pas comédienne. J’ai passé le casting, pour y figurer en tant que doublure et mettre au service de cette fiction mes capacités d’athlète. Je pense que ma situation et mon abnégation à vouloir courir ont touché toute l’équipe de réalisation. C’est aussi pour cela qu’ils ont souhaité, je pense, nous embarquer dans l’aventure. Je leur dois beaucoup. Grâce à eux, j’ai pu reprendre plus rapidement le chemin des pistes. Le tournage a été utilisé comme prétexte pour obtenir l’autorisation du corps médical à reprendre l’entrainement et accéder au matériel. On a pu faire pression sur les personnes qui, autour de moi, avaient des doutes ou des inquiétudes et accélérer les choses.

Entre le fait de reprendre la course quatre mois après votre amputation et celui d’évoluer à un niveau professionnel, jusqu’à décrocher des titres aux Jeux Paralympiques, il y a encore un monde…

L’étape qui suit rapidement, après m’être remise à courir, c’est la reprise de la compétition. Cela tient à ma conception de la pratique sportive. À titre personnel, je ne me vois pas faire du sport sans compétition, sans défi. C’est cela qui me motive et me pousse à avancer. En tant que présidente du comité paralympique, c’est aussi le défi qui m’anime, cette envie de faire mieux, d’aller plus  loin. Donc, très rapidement, la compétition va revenir dans mon programme. Et tout va s’enchaîner assez rapidement avec les premiers championnats de France, puis les premiers championnats du monde « jeunes ». 2006 sera un peu l’année de la révélation. Je pars aux championnats du monde « élite » aux Pays-Bas et reviens avec trois médailles d’argent. Là, je prends conscience du potentiel, de ma capacité à aller chercher des médailles. L’étape suivante, ce sont les Jeux Paralympiques, avec cet espoir d’être effectivement médaillée.

En quoi le sport, la dynamique qui sous-tend sa pratique, vous a permis de vous relever aussi rapidement ?

En tant que personne souffrant d’un handicap, lorsque l’on est dans la compétition, lorsque l’on se remet à courir, accompagné par des entraineurs, des supporters, le regard que l’on porte sur vous est bien différent. Il y a moins de pathos, d’attendrissement. On regarde vers le prochain objectif. La dynamique est beaucoup plus vertueuse. C’est aussi cela qui m’a aidée à me reconstruire, à dépasser les doutes et les interrogations.

Ces médailles olympiques tant espérées sont arrivées rapidement…

Oui, ça arrive en 2008 à Pékin, avec deux médailles d’argent. J’en sors cependant avec un sentiment mitigé, une certaine frustration. Elle est liée au fait que je n’avais pas pris la mesure de ce qu’étaient les Jeux Paralympiques, de ce qu’impliquait d’être une athlète de haut niveau. Ma rigueur d’entraînement, ma rigueur de vie ne correspondaient pas à ce qu’il fallait être et faire pour gagner le titre. Considérant ces regrets, j’ai appliqué les changements nécessaires pour que, à Londres, lors des Jeux suivants, je ne laisse pas s’échapper la médaille d’or. Nous avons donc densifié le nombre d’entraînements. Ma vie s’est organisée autour du sport, mais pas au point d’arrêter mes études pour autant. Tout au long de ma vie, j’ai toujours tenu à avoir un double projet. Tout en m’entrainant avec l’ambition de décrocher une médaille d’or à Londres, je poursuivais mon master. L’enjeu était de se donner les moyens d’y arriver.

Etait-ce évident, à ce moment, de trouver l’encadrement nécessaire pour accomplir cet exploit ?

J’ai toujours eu le même encadrement. Nous l’avons organisé à notre niveau. C’est d’ailleurs le coach qui m’a fait recourir en 2004 qui m’a accompagnée dans le temps et m’a amenée sur mes différents titres paralympiques. Cependant, depuis lors, le mouvement parasportif et paralympique a considérablement évolué. Il s’est fortement professionnalisé en France et à l’international. Les performances qu’on réalisait en 2008 ne sont pas du tout les mêmes que celles que nous enregistrons aujourd’hui. En tant qu’athlète, il a aussi fallu s’adapter au regard de cette évolution, qui demande plus d’exigence et de professionnalisme, cela afin de pouvoir rester dans la course aux médailles. Nous y avons veillé au sein de ma cellule individuelle, mais aussi en travaillant avec la fédération, en s’entourant de compétences de plus en plus élevées. On le voit aujourd’hui : les Jeux Paralympiques sont une compétition de très haut niveau dont le rayonnement ne cesse de croître. Au-delà de la performance, elle porte aussi des messages très forts sur l’importance de la pratique du sport pour les personnes en situation de handicap et de les accompagner pour leur permettre de le faire.

Quand on parle d’handisport, notamment dans votre discipline, il y a aussi une dimension technique qu’il ne faut pas négliger…

Oui, technique et technologique. En fait, il y a deux choses à considérer. En premier lieu, il faut trouver comment adapter son geste sportif, sa technique de course, à sa situation de handicap et au sport que l’on pratique. C’est quelque chose que l’on a intégré dans le modèle d’entraînement progressivement. Pour être championne paralympique, il faut d’abord être une bonne athlète. Cependant, on a aussi compris qu’il y avait certaines spécificités à prendre en compte. Il est aussi essentiel de travailler sur des leviers plus technologiques, sur le choix de lame, sa dureté, son réglage. On a aussi peaufiné notre expertise en la matière. Ce qui est intéressant, c’est de voir comment les compétences dans ce domaine se développent en France, avec des acteurs qui tiennent compte de la singularité de chaque athlète et des entraîneurs de plus en plus experts. L’arrivée des Jeux de Paris 2024 a aussi donné une impulsion très forte. Dans le domaine scientifique, les recherches sur la technologie au service de la performance font partie inhérente du parcours d’un sportif de haut niveau paralympique.

« Pour être championne paralympique, il faut d’abord être une bonne athlète. Mais il est aussi essentiel de travailler sur des leviers plus technologiques. »

Vous décrochez votre première médaille d’or à Londres, l’une des plus importantes pour vous. Quelle est votre sentiment lors de cette consécration ? Est-ce une forme d’aboutissement ?

C’est effectivement une des plus belles médailles. Sur le moment, on se dit que c’est une forme d’aboutissement, l’accomplissement d’un rêve, d’une ambition, d’un travail qui a été mené sur de très longues années. Et puis, ces Jeux de Londres étaient vraiment magiques, avec un public extraordinaire présent pour saluer la performance des athlètes du monde entier. C’est à partir de là que les Jeux Paralympiques vont engager leur mutation, acquérir une réelle reconnaissance, mieux rayonner à l’international.

Vous parlez d’un aboutissement. Pourtant, des médailles, il y en a encore eu de nombreuses par la suite…

Oui. Ce sentiment d’accomplissement, bien que réel, ne dure qu’un temps. Très vite, on se rend compte que ce n’est pas la fin du parcours. Que, au contraire, on a encore plein de choses à vivre et à accomplir. Au-delà de chaque titre, chaque performance, un nouveau projet naît, une nouvelle ambition prend corps. Pour moi, il s’agissait de parvenir à conserver ce titre. Pour cela, il faut se remettre au travail, évoluer, procéder à des adaptations pour rester compétitive. C’est essentiel si l’on veut rester dans le « game ». Puis, au-delà de ma carrière d’athlète, il y a eu cette opportunité de prolonger mon engagement au niveau du comité paralympique, en acceptant sa présidence.

« Au-delà de chaque titre, chaque performance, un nouveau projet naît, une nouvelle ambition prend corps »

Qu’est-ce qui vous a conduit à endosser cette responsabilité ?

À travers cette fonction, c’est principalement l’opportunité de poursuivre un travail autour des valeurs de transmission et de structuration de l’accompagnement des sportifs en situation de handicap qui m’a été offerte. Au départ, cela part d’un sentiment de redevabilité. Le système m’a offert beaucoup d’opportunités et mon envie était de pouvoir donner cette chance à d’autres, de la façon la plus large possible, pour que toutes les personnes en situation de handicap puissent en profiter. Au-delà de ma carrière d’athlète, j’ai vraiment eu envie de de prôner ces valeurs, au début à ma petite échelle, en profitant de mon statut de médaillée, puis au travers des institutions comme le comité de candidature de Paris 2024 et, enfin, au sein du Comité paralympique.

« La notion d’inclusion est aujourd’hui mieux comprise, mieux perçue, avec des réponses structurelles qui sont apportées »

On parle beaucoup d’inclusion, de diversité, à l’échelle de la société et des entreprises. Comment avez-vous vu évoluer les choses en la matière ?

Plutôt bien, même si on est encore loin d’être dans une situation idéale. La notion d’inclusion est aujourd’hui mieux comprise, mieux perçue, avec des réponses structurelles qui sont apportées, et ce par rapport à tous les aspects de la vie d’une personne en situation de handicap. Notre enjeu premier, dans le domaine sportif, est de travailler cette question de l’inclusion. Comment favoriser cet accès ? Comment engage-t-on les partenaires clés, c’est-à-dire les institutions, l’État, les collectivités ? Il y a tout un écosystème à mobiliser pour améliorer les choses à l’échelle du territoire. En la matière, les Jeux de Paris 2024 ont considérablement aidé. Autour d’un objectif commun, nous avons pu rassembler les acteurs afin de favoriser la pratique sportive des personnes en situation de handicap. L’ambition est de former d’ici fin 2025 plus de 3.000 nouveaux clubs à l’accueil de ces sportifs. Les Jeux de Paris 2024 ont aussi constitué un véritable incubateur de solutions innovantes en faveur du handicap. Jamais dans la société française, on avait autant parlé des enjeux d’inclusion, d’accessibilité. Le défi était d’accueillir le monde dans sa diversité, dans sa différence.

Un deuxième enjeu, c’est aussi de faire que cette dynamique d’inclusion dans le sport constitue un tremplin, un levier plus global pour l’inclusion dans notre société. Si l’on peut accueillir des personnes en situation de handicap dans le domaine sportif, on peut y arriver ailleurs, à l’école, dans les entreprises.

Quels sont les défis à relever pour y parvenir ?

Il s’agit d’amener un changement de regard sur le handicap, de voir chacun sous l’angle des compétences et des capacités qu’il peut amener plutôt qu’au travers fes habiletés perdues. Il s’agit de faire valoir l’intérêt d’embaucher un collaborateur en situation de handicap, cela au regard des valeurs de persévérance, de dépassement, d’habileté et d’agilité dont il doit faire preuve au regard de son parcours. Mais on a encore un besoin de convaincre, en agissant sur la sensibilisation des collaborateurs et des managers. Une fois que les entreprises sont convaincues, elles deviennent les plus belles ambassadrices de ce modèle-là. Le troisième enjeu, c’est d’amener les uns et les autres à faire du sport ensemble, pour mieux apprendre à se connaître. Il s’agit de lever ces barrières liées à la différence et à la peur qui y est associée.

Avec les Jeux de Paris, pour le Comité paralympique que vous présidez, la compétition est aussi au programme. L’objectif, c’est d’aller chercher des médailles…

Il y a une grande ambition effectivement. L’objectif est de rentrer dans le Top 8 des Nations paralympiques. Cela va nécessiter, dans nos projections, de gagner plus de 20 médailles d’or, c’est-à-dire le double de ce que nous avions obtenu à Tokyo avec 11 médailles d’or pour l’équipe de France Paralympique. C’est un objectif de taille. Mais les résultats des derniers championnats du monde nous permettent d’être confiants.

Malgré la préparation des Jeux et vos responsabilités actuelles, avez-vous encore le temps de courir ?

Oui, je me l’impose en fait. Ne pas avoir le temps ne constitue pas une excuse. Il faut s’organiser pour le trouver. Je pars du principe qu’on doit prendre le temps de faire du sport régulièrement. Je ne parle pas de sport en compétition, mais simplement du sport pour prendre soin de soi, pour vieillir en bonne santé. C’est aussi des messages que l’on souhaite porter au travers des Jeux de Paris 2024. C’est un principe que j’applique avec 3 à 4 séances de course par semaine au minimum.

La compétition, ça ne vous manque pas ?

Non parce que je me suis fixé d’autres défis, parce que je sais exactement pourquoi j’ai arrêté. Cela m’a libérée d’un poids, de certaines contraintes. J’ai une vie qui est différente, mais qui dans mon cas a été totalement choisie, donc qui est totalement assumée.

Et épanouissante…

Tout à fait. Cet été, je vais vraiment vibrer, à travers les émotions que vont faire vivre les athlètes et les valeurs qu’ils vont porter.

« On peut faire du sport un levier- d’inclusion global dans la société »

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