HUMAN
Dans l’open space avec KARINE ROLLOT
Cheffe d’orchestre aux multiples partitions, Karine Rollot dirige le département des ressources humaines des Hôpitaux Robert Schuman depuis 15 ans, une structure qui représente 2.300 salariés et 310 médecins. Elle évoque avec nous comment la fonction RH a évolué pour devenir un pôle stratégique de l’institution.
June 10, 2025

Dans le milieu hospitalier, vous devez gérer le recrutement d’un large panel de profils, certains très spécialisés. Quels sont les principaux défis auxquels vous êtes confrontée ?
Le milieu hospitalier comporte une grande diversité de métiers, dont des profils très pointus. Depuis la crise sanitaire, la guerre des talents se fait ressentir, particulièrement dans le secteur de la santé. Certains profils se font rares, comme les infirmiers spécialisés, au niveau des ATM (assistants techniques médicaux) en chirurgie ou en radiologie par exemple. Nous allons chercher de plus en plus de profils avec des aptitudes technologiques.
Au-delà du recrutement externe et des efforts portés sur l’attractivité, nous misons beaucoup sur la mobilité interne et la fidélisation du personnel. Pour cela, nous avons mis en place un programme de formations varié.
Beaucoup de personnel travaillant dans les hôpitaux luxembourgeois provient des pays frontaliers. Quelles sont les implications liées à cette particularité ?
Le défi majeur, en lien avec les différentes provenances des membres du personnel, réside dans la reconnaissance des diplômes pour la majorité des métiers du soin et du secteur médical. Il arrive très souvent que le diplôme d’une personne recrutée doive faire l’objet d’une reconnaissance pour obtenir l’autorisation d’exercer au Luxembourg. Cela peut avoir un impact considérable sur la durée du processus de recrutement. Obtenir la reconnaissance d’un diplôme peut prendre 2 à 3 mois. Notre activité est directement impactée par cette spécificité.
Beaucoup d’hôpitaux frontaliers ont aussi entamé des démarches afin de renforcer leur attractivité. Pour trouver les bonnes personnes, de plus en plus, nous devons aller chercher au-delà de la Grande Région. Nous avons, entre autres, déployé des campagnes d’annonces ciblées sur des sites spécialisés. Nous avons aussi retravaillé notre marque employeur.
Comment faites-vous pour attirer les nouvelles générations ?
Les générations Z et alpha expriment des attentes différentes de celles des générations précédentes. Les jeunes accordent une importance particulière à leur équilibre vie professionnelle/vie privée. Ils cherchent davantage de temps partiels et plus de flexibilité. Nous essayons de nous adapter à leurs besoins, tout en prenant en compte ceux de l’organisation et de la collectivité.
Pour les recruter, nous devons être pro-actifs et aller à la rencontre des jeunes sur les forums spécialisés de l’emploi. Nous collaborons également avec les lycées et les universités. Pour parer aux difficultés de recrutement, nous engageons entre 800 et 1.000 stagiaires par an.
Quel défi représente la progression des nouvelles technologies ? Avez-vous mis en place un programme de formation en interne pour garder le personnel à jour ?
Nous avons mis en place un socle de formations obligatoires pour l’ensemble du personnel. Au-delà, nous misons aussi sur des formations en robotique, dans le domaine de la digitalisation, le data management et sur des formations en présentiel et en e-learning… Toutes les fonctions sont concernées. Nous essayons de diversifier la palette d’outils permettant de répondre à ces nouveaux défis.
L’intelligence artificielle évolue à une vitesse folle. De nouveaux métiers vont voir le jour et d’autres seront supprimés. Nous en sommes conscients et nous essayons de faire preuve d’agilité et d’anticiper un maximum.
Les métiers de la santé font partie des plus touchés par les problèmes de santé mentale. Comment faites-vous pour créer de bonnes conditions de travail ?
Ce sont plutôt les problèmes musculo squelettiques qui causent l’absentéisme chez nous. Pour pallier ce problème, nous tentons de rester flexibles sur les modes de travail et les horaires. Nous avons une politique de gestion des situations d’absentéisme afin de minimiser les disfonctionnements dans les équipes. Pour cela, nous travaillons en étroite collaboration avec les équipes, la médecine du travail, et la Délégation du personnel.
Depuis le Covid, nous remarquons une certaine recrudescence des agressions verbales et parfois physiques. En interne, un système de déclaration permet au personnel de faire remonter ce type de conflits. Pour pouvoir générer la bienveillance, nous misons beaucoup sur la prévention, et nous essayons d’armer les équipes avec des outils qui permettent d’éviter toute escalade de violence.
De manière générale, comment a évolué la fonction RH dans le secteur hospitalier ?
La fonction RH a beaucoup évolué ces dernières années et a pris une ampleur stratégique.
Nous devons être capable de passer constamment d’une thématique à l’autre. Il faut être vigilants aux lois qui changent souvent, travailler avec différentes générations qui se côtoient tous les jours… Être DHR, c’est un peu être comme un chef d’orchestre avec énormément de partitions. C’est un métier très passionnant et très prenant qui demande de l’énergie, de la résilience et de l’agilité.
Bureau ouvert ou fermé ?
Ce sujet est un sujet délicat. Je suis très consciente que ce n’est pas toujours évident et idéal de travailler dans un open space. Personnellement, j’ai « grandi » dans des open spaces quand j’ai débuté à Luxembourg. Aujourd’hui je partage mon bureau avec deux autres collègues et je trouve cela enrichissant de pouvoir collaborer et partager. Quand j’ai besoin de m’isoler, je trouve un autre lieu dans l’hôpital
Mes 3 app indispensables
- Teams : “Même si personnellement, je préfère l’échange humain. Parfois, au lieu d’envoyer un mail, cela permet de tout simplement se parler.”
- Google : “Pour alimenter mes réflexions, je m’inspire de mes différentes recherches sur le web. J’aime aller piocher les bonnes idées et les bonnes pratiques sur des sites spécialisés”.
- LinkedIn : “On trouve un grand nombre de sujets sur LinkedIn. Cela reste un espace professionnel indispensable pour appendre, et échanger.”.