DIGITAL SOLUTIONS
« Une bonne gouvernance est essentielle pour mener à bien un programme d’automatisation à l’échelle d’une organisation »
L’intégration de technologies innovantes et d’intelligence artificielle afin d’améliorer les processus d’une entreprise exige de se doter d’une gouvernance adaptée. Elle est l’une des conditions indispensables permettant la montée en charge sans heurts et garantira le choix des meilleurs cas d’usage, le contrôle des technologies dans le temps ainsi qu’une sécurité optimale dans la mise en œuvre.
January 22, 2020
Dans un environnement de plus en plus compétitif, les organisations ont recours à de nouveaux leviers d’amélioration de leur performance. A tous les niveaux de l’entreprise, on cherche en permanence à faire mieux avec un niveau de ressources équivalent. « L’ensemble des acteurs sont amenés à évoluer dans un monde de plus en plus complexe, assure Julien Baudouin, Lighthouse Intelligent Automation Leader au sein de KPMG. Cela est particulièrement perceptible dans le secteur financier, où l’on voit déferler de nouvelles réglementations qui exigent des différentes parties de mettre en place de nouvelles mesures, d’adapter leurs procédures, de transformer leurs systèmes d’information à une vitesse de plus en plus grande. Cette pression réglementaire entraine des coûts supplémentaires et pèse sur les marges. Chacun, pour garantir sa viabilité à long terme, doit trouver le moyen de réduire son ‘cost-to-serve’, autrement dit les coûts à assumer pour délivrer ses produits et services ».
Automatiser pour alléger les coûts
Une des réponses passe par la technologie. Aujourd’hui, les solutions d’automatisation robotisée des processus s’appuyant sur des robots aux aptitudes limitées permettent déjà de fluidifier les processus, sans alourdir de manière trop conséquente le système d’information ni les coûts. « La Robotic Process Automation (RPA) permet déjà d’automatiser de nombreux processus manuels et répétitifs, comme la réalisation de reporting, la réconciliation des données ou la gestion de blocage de compte, explique Julien Baudouin. Le robot va reproduire des actions humaines n’impliquant pas de prise de décision mais qui suivent des règles connues à l’avance et dépendant de plusieurs variables ». Libéré de ces tâches répétitives et chronophages, le collaborateur pourra se concentrer sur des fonctions générant davantage de valeur pour l’entreprise.
Intégrer des solutions intelligentes
« L’apprentissage machine (ou machine learning en anglais), d’autre part, va encore plus loin. Sur base d’approches mathématiques et statistiques, un humain va donner au robot la capacité d’« apprendre » un modèle à partir d’un jeu de données d’entraînement. Le robot appliquera ensuite le modèle appris sur un second jeu de données afin d’obtenir le résultat correspondant à la tâche souhaitée. « Cette technologie est notamment utilisée pour extraire de l’information de documents non structurés, faciliter leur classification ou en améliorer le traitement. On peut par exemple envisager l’extraction de données de factures reçues. Il est aussi possible d’orienter plus efficacement les e-mails reçus vers les bonnes équipes en fonction du contenu qu’ils recèlent. Au niveau des assistants virtuels (ou chatbots), cette technologie, avec sa capacité à comprendre le langage naturel, permet d’apporter des réponses immédiates et sans exiger d’intervention humaine aux diverses requêtes qui leur sont formulées, telles que les questions les plus fréquemment posées. »
D’autres modèles cognitifs plus avancés peuvent apporter des réponses à des problématiques encore plus complexes. A ce niveau, la machine est capable d’apprendre par elle-même et, en considérant de nombreuses variables, d’arriver aux résultats escomptés. « Les assureurs sont notamment intéressés par ce genre de modèles afin qu’à partir d’une photo d’un accident de voiture, par exemple, de tels outils permettent de directement évaluer le montant des dégâts », poursuit l’expert.
Se doter d’une gouvernance adaptée
Même si ces technologies permettent d’accéder à des gains d’efficience considérables rapidement sur des fonctions bien identifiées et isolées, un des enjeux majeurs pour pouvoir en tirer profit sur le long terme et à l’échelle de l’organisation toute entière réside cependant dans la mise en œuvre d’une gouvernance.
« La première étape est généralement la création d’un centre d’excellence (ou CoE) qui permettra de piloter l’ensemble des initiatives d’automatisation intelligente d’une manière coordonnée au sein de l’organisation », assure Julien Baudouin. Ce CoE, qui va s’assurer que l’organisation sera à même de se doter des compétences nécessaires pour mener sa transformation digitale, sera également le point de contact unique avec les différents éditeurs de solutions intelligentes. Il sera encore garant des standards de développement mais aussi des méthodologies afin d’identifier les bons processus à digitaliser, de prioriser les projets en fonction de la valeur générée et de gérer les risques dans leur ensemble.
L’exigence de l’analyse et de la gestion du changement
Tout projet de transformation incluant des technologies d’automatisation, qu’il s’agisse de simples robots ou de solutions plus élaborées, exige cependant de procéder préalablement à une analyse fine des besoins et des processus dans leur ensemble.
La gestion du changement à l’échelle de l’organisation doit, elle aussi, être bien appréhendée. « La première cause d’échec de projets impliquant ces nouvelles technologies réside dans le fait que l’on n’a pas suffisamment expliqué aux équipes que ces technologies étaient mises en œuvre pour les soulager dans leur quotidien et non pour supprimer leurs emplois, poursuit l’expert de KPMG. Or, les équipes doivent pouvoir contribuer à une meilleure intégration de ces technologies, en tenant compte des diverses étapes d’exécution ainsi que des exceptions qu’elles connaissent mieux que quiconque. D’autre part, la participation des collaborateurs leur permettra de mieux se projeter en tenant compte de la manière dont évolue leur fonction et d’éviter ainsi qu’ils se sentent menacés par une technologie qui est avant tout là pour leur permettre de créer de la valeur autrement. »