DIGITAL BUSINESS
La réglementation, un frein à l’innovation?
La réglementation luxembourgeoise telle qu’elle existe aujourd’hui constitue-t-elle un frein à l’implantation des FinTech et à la transformation des acteurs financiers ? Pour les premiers, elle rendrait plus ardue la monétisation de leurs innovations. Pour les seconds, elle complexifierait l’intégration de solutions venues d’ailleurs. Mais comment l’assouplir sans risquer de mettre à mal l’ensemble des secteurs IT et financier ? Le débat anime le réseau CIONET.
February 18, 2016
La réglementation luxembourgeoise telle qu’elle existe aujourd’hui constitue-t-elle un frein à l’implantation des FinTech et à la transformation des acteurs financiers ? Pour les premiers, elle rendrait plus ardue la monétisation de leurs innovations. Pour les seconds, elle complexifierait l’intégration de solutions venues d’ailleurs. Mais comment l’assouplir sans risquer de mettre à mal l’ensemble des secteurs IT et financier ? Le débat anime le réseau CIONET.
La stratégie Digital Lëtzebuerg considère comme capitale la transformation digitale des acteurs de la finance luxembourgeoise, avec pour principale motivation la préservation du positionnement international enviable de la Place ainsi que sa compétitivité. Le développement d’une activité dite « FinTech » est essentiel. Dans ce contexte, toutefois, les efforts consentis ne porteront leurs fruits que si les acteurs financiers dits « traditionnels » s’ouvrent à ceux qui sont porteurs d’innovation. Rien n’est moins évident au Luxembourg. « La question qui se pose aujourd’hui a trait à la capacité d’innovation du marché. Or, comme l’ont révélé les groupes de travail menés par CIONET en 2015, les dirigeants IT apparaissent encore trop englués dans l’opérationnel, précise Pascal Lanser, country manager de CIONET. Il faut saluer les initiatives du gouvernement et de plateformes fédératrices comme Luxembourg for Finance pour attirer des acteurs innovants et leur permettre de se déployer. Il est cependant tout aussi important de faciliter les rencontres entre les acteurs du business et ces acteurs innovants, plus que ça ne l’est aujourd’hui. » Car, pour qu’un écosystème fonctionne, il faut des acteurs innovants d’une part et suffisamment d’acteurs financiers en capacité d’intégrer leurs innovations d’autre part.
La réglementation, frein à l’innovation
Le groupe de travail « FinTech » du réseau des CIOs luxembourgeois s’est penché sur les conditions d’émergence d’un écosystème FinTech au Grand-Duché et sur la manière dont celui-ci pouvait effectivement mieux servir le secteur. Les CIOs ont soulevé qu’il subsistait encore quelques points d’attention et d’interrogation en la matière. « A moyen terme, les acteurs innovants vont devoir commercialiser leurs innovations auprès d’acteurs de la finance. S’ils sont parvenus à mettre au point des solutions pertinentes, vu leur taille, ils sont rarement les propriétaires de leurs infrastructures, voire même de leur technologie. D’autre part, l’intégration de leurs innovations auprès d’institutions luxembourgeoises, considérant la réglementation actuelle, n’est pas forcément aisée. Dans un cadre où il est difficile de déplacer les données, le Luxembourg n’offre sans doute pas le cadre idéal leur permettant de largement monétiser leur technologie. »
Dans ses conclusions, le groupe de travail émet l’hypothèse que de nombreux acteurs FinTech, à moyen terme, iront là où les possibilités de développer leur business seront les plus étendues. En quoi le Luxembourg, dès lors, serait une meilleure place pour adresser des solutions innovantes à l’ensemble des acteurs du secteur, ceux présents au Luxembourg comme ceux qui se trouvent en dehors ?
Si, pour attirer des acteurs innovants, le Luxembourg parvient à apporter des réponses à la problématique des talents et même de financement, la réglementation, telle qu’elle est établie aujourd’hui, ne constitue-t-elle pas une barrière au développement de l’écosystème FinTech ?
La réglementation, frein à la transformation digitale des acteurs financiers
Du côté des CIOs, le problème est tout autre, mais tout aussi épineux. « Il est aujourd’hui difficile, ou alors extrêmement complexe et couteux, pour les acteurs luxembourgeois de profiter de solutions FinTech venues d’ailleurs. La réglementation en vigueur implique, dans beaucoup de cas, qu’un PSF de support luxembourgeois réplique des solutions systèmes venues d’ailleurs à l’échelle de la Place en vue de proposer une offre compliant », précise Pascal Lanser. Autant dire que, au regard de la taille du Luxembourg et des acteurs présents, l’opportunité business n’est pas toujours au rendez-vous. Autrement dit, alors qu’il est demandé aux acteurs financiers d’opérer une transformation digitale, il est aujourd’hui plus difficile pour les acteurs luxembourgeois que pour d’autres d’accéder à l’ensemble des innovations développées ci et là, à Londres, Paris ou dans la Silicone Valey, et distribuées à travers le cloud.
Ne pas scier la branche sur laquelle on est assis
Toutefois, les CIOs fédérés dans le réseau CIONET reconnaissent que l’assouplissement de la réglementation peut entrainer d’autres conséquences plus importantes. Le débat, évidemment, amène à une autre question : si on assouplit le cadre, l’IT ne risque-t-il pas de tout simplement quitter le Luxembourg ? Conserver ou transformer ? Sachant que la transformation constitue désormais une clé de la préservation de la compétitivité de la Place financière, il est aujourd’hui important de trouver un bon compromis.