DIGITAL BUSINESS

La nouvelle vie de la Start-up Footbot

Foobot propose une solution innovante permettant de réaliser des économies d’énergie grâce à l’IA.

February 25, 2022

Après son moniteur connecté d’analyse de la qualité de l’air, la start-up luxembourgeoise Foobot propose aujourd’hui une solution innovante permettant de réaliser des économies d’énergie grâce à l’IA. Jacques Touillon, son CEO, revient avec nous sur l’histoire de la société et sur l’évolution de son offre.

En 2014, Jacques Touillon, Lyonnais d’origine et CEO de Foobot, débarque aux USA avec, sous le bras, son objet connecté révolutionnaire capable d’analyser la qualité de l’air… Six ans plus tard, après que des dizaines de milliers de ces boîtiers se sont vendus outre-Atlantique, la start-up est de retour sur le marché européen avec un nouveau produit permettant de réduire considérablement la consommation d’énergie des bâtiments.

Pour comprendre ce revirement, il faut remonter sept années en arrière et revenir à la genèse de la start-up. « En 2013, on diagnostique l’asthme des bébés à mon fils. Je me rends alors compte que, contrairement au secteur alimentaire où l’on sait plus ou moins ce que l’on ingère, on ne connait pas la qualité de l’air que l’on respire, explique Jacques Touillon, alors chef d’entreprise dans une société de communication environnementale. Si j’ai toujours été orienté business dans mon parcours professionnel, j’ai aussi toujours été attiré par la philosophie du « doing good ». Avec l’aide d’un ingénieur, nous avons donc élaboré un objet connecté permettant de savoir ce qu’il y a dans l’air. Une fois le prototype réalisé, nous nous sommes heurtés à un cruel manque de soutien en France. » Bpifrance, l’équivalent français de Luxinnovation, propose ainsi à la start-up un coup de pouce financier de 30.000 euros… à condition d’injecter 30.000 euros personnels. « Au Luxembourg, avec exactement le même dossier, Luxinnovation nous accompagne avec une subvention de… 820.000 euros pour lancer notre concept ! », explique Jacques Touillon, qui traverse alors l’Atlantique pour tenter de trouver des partenaires américains, davantage sensibles aux objets connectés que les Européens. « Le produit a connu un certain succès aux États-Unis, mais on s’est heurté à un nouveau constat : notre objet connecté rend compte de la qualité de l’air mais n’offre pas de solutions concrètes dans le cas où les résultats ne sont pas positifs. Or, contrairement à nous, les Américains ont besoin qu’on leur offre une solution concrète. Nous avons donc essayé de vendre notre technologie aux fabricants de CVC (chauffage, ventilation et climatisation) en leur disant qu’ils allaient pouvoir améliorer la qualité de l’air dans les maisons et les bureaux. Cela n’a malheureusement pas fonctionné car ils ont pensé que notre système de capteurs serait davantage un détecteur de mauvais fonctionnement du système de ventilation en place. D’autre part, on s’est rendu compte que les gens n’étaient pas prêts à payer pour une ressource gratuite comme l’air. Vendre de l’air, aussi bon soit-il, ce n’est pas évident… », sourit Jacques Touillon.

DEUX ANS DE R&D

Dans une impasse, le CEO se rend alors avec sa solution chez Nest, leader mondial des thermostats connectés. « Nous avions de très bons résultats dans l’amélioration de la qualité de l’air et dans la gestion des besoins énergétiques, mais ils n’étaient pas intéressés, explique Jacques Touillon. En même temps, cela nous faisait un bon proof of concept. Nous avons donc décidé de faire un pivot de la start-up et, après deux ans de recherche & développement, nous avons créé une solution basée sur l’IA permettant à un bâtiment de réaliser entre 35 et 45 % d’économies d’énergie. » Alors que des contacts étaient avancés aux États-Unis, le Covid est venu freiner les projets de la start-up, qui a finalement refait de l’Europe son terrain de chasse. Avec une dizaine de clients, qui représentent une vingtaine de bâtiments, principalement en France et en Grande-Bretagne, Foobot et son équipe de sept personnes continuent de démarcher un peu partout en Europe pour commercialiser leur produit.

LE DEEP LEARNING ET LE DIGITAL TWIN

Mais concrètement, comment cela fonctionne ? « Grâce à l’IA, et plus précisément le deep learning, nous sommes capables de modéliser un digital twin du bâtiment. Dans ce jumeau numérique, nous allons entraîner l’IA en simulant des milliers de scénarios différents. Ce qui prendrait des centaines d’années à faire dans la vraie vie peut être réalisé en quelques jours grâce à cette technologie. Une fois l’IA entraînée, nous la connectons au système CVC directement via la Gestion Technique du Bâtiment (GTB), qui contrôle et supervise le chauffage et la ventilation d’un bâtiment, et plaçons des capteurs de CO2, de particules fines, des détecteurs de mouvement, etc. Notre solution prend alors en compte les données du bâtiment en temps réel, les prévisions relatives à l’environnement extérieur, et calcule toutes les 15 minutes les meilleurs réglages pour réduire la consommation d’énergie », explique Jacques Touillon. Foobot permet donc d’optimiser les besoins en énergie pour réduire la facture tout en préservant le confort thermique. À Copenhague, par exemple, un immeuble équipé de Foobot a noté une diminution de ses besoins énergétiques de 52 % et a confirmé le maintien de la qualité d’air. « Ce sont parfois des petites économies d’énergie ci et là, mais lorsque nous les mettons toutes bout à tout, l’impact est énorme », assure Jacques Touillon.

A l’heure actuelle, la solution de la startup s’adresse principalement aux bâtiments non résidentiels. « Tout simplement car la grande majorité des projets résidentiels ne possèdent pas de GBT, précise le CEO. Nous trouvons une oreille attentive principalement auprès des grosses entreprises, des grands groupes. Pourquoi ? Car elles ont généralement adopté une réelle stratégie, un plan d’action en matière d’économie d’énergie ou de lutte contre le réchauffement climatique. Ce qui n’est pas forcément le cas des plus petites entreprises, pour lesquelles ce n’est pas une priorité. » Avec au minimum 35 % d’économie d’énergie promis et un retour sur investissement prévu en deux ans maximum, l’argumentaire de Foobot a pourtant de quoi séduire. « En outre, nos clients ne payent pas tant que nous n’avons pas atteint au moins 20 % d’économie d’énergie », souligne Jacques Touillon qui vient de signer deux nouveaux contrats en France avec un centre hospitalier ainsi qu’une clinique.

« Les gens n’étaient pas prêts à payer pour une ressource gratuite comme l’air. Vendre de l’air, aussi bon soit-il, ce n’est pas évident… »

À LA RECHERCHE DE PARTENAIRES AU LUXEMBOURG

Foobot offre un retour sur investissement de quelques mois à moins de deux ans. « Quand on sait qu’il faut compter entre 140 et 400 €/m2 dans un projet de rénovation, notre service est 100 fois moins cher, pour au moins 35 % d’économies du CVC… C’est dérisoire ! », rappelle le CEO, qui regrettede ne pas encore avoir trouvé de partenaires au Luxembourg. « Les bâtiments au Grand-Duché sont pourtant suréquipés, ils ont tout ce qu’il faut pour recevoir notre solution. Je pensais que tout le monde serait motivé à l’idée de faire des économies d’énergie à l’heure où on chauffe des bureaux à plein tube alors que la majorité des employés sont en télétravail, mais ce n’est visiblement pas le cas… »

En 2022, Jacques Touillon et ses associés lanceront une levée de fonds, en parallèle de leur démarchage commercial, afin de pouvoir accélérer les ventes en Europe avant de repartir à la conquête du marché américain. « Ce sont des méga-consommateurs, certes, mais la plupart des sociétés américaines ont établi des feuilles de route pour diminuer leur consommation d’énergie. Ils devraient donc être sensibles à notre concept », assure le CEO.

LE RÔLE DES CLEANTECHS DANS LA NEUTRALITÉ CARBONE

A l’heure où il est question de faire toujours plus d’efforts pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et atteindre la neutralité carbone, les CleanTechs comme Foobot espèrent tirer leur épingle du jeu et contribuer à cet objectif. « Dans cette mission, nous sommes soutenus par la jeune génération, bien décidée à mettre un véritable coup de pied dans la fourmilière. Lorsque je suis en meeting avec des gens de mon âge, bien souvent, ils font tout juste l’effort de m’écouter. Les jeunes, eux, ils comprennent tout de suite, posent des questions, se montrent intéressés. Reste maintenant à attendre que ces jeunes prennent la place des décideurs pour voir un réel changement dans notre société… »

Watch video

In the same category