TRANSFORMATION & ORGANISATION

Le défi critique de l’évolution des compétences

Pour assurer leur compétitivité au sein d’une économie digitale, les entreprises doivent s’appuyer sur de nouvelles compétences.

April 12, 2017

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Christian Scharff, associé et People & Organisation Leader chez PwC Luxembourg

Pour assurer leur compétitivité au sein d’une économie digitale, les entreprises doivent s’appuyer sur de nouvelles compétences. Plus largement, c’est l’ensemble de la force de travail qui doit évoluer pour éviter toute crise sociétale. En anticipant mieux les besoins à venir, il faut pouvoir investir dans la formation continue. Un tel défi doit mobiliser tant les entreprises que les travailleurs eux-mêmes et les pouvoirs publics. – Par Sébastien Lambotte

 

La technologie transforme notre monde. Et le défi, pour les entreprises, est de pouvoir l’appréhender afin d’assurer sa compétitivité dans une économie toujours plus digitale. « IoT, intelligence artificielle, robotique avancée… La technologie est là, disponible. Les freins à la transformation digitale ne sont désormais plus technologiques, mais se situent au niveau des organisations et plus encore des compétences nécessaires pour la mettre en œuvre », explique Christian Scharff, associé et People & Organisation Leader chez PwC Luxembourg.

De nouveaux besoins en compétences

Pour entrer pleinement dans l’ère numérique, les entreprises doivent repenser leurs processus opérationnels, voire leur modèle. Et pour cela, il faut qu’elles puissent s’appuyer sur de nouvelles compétences, capables de les emmener plus loin. Mais, encore faut-il pouvoir les attirer ou les développer. « A l’horizon 2020, on estime que 700.000 personnes manqueront dans les métiers du digital à l’échelle de l’Union européenne, entre professionnels du code, data scientists ou spécialistes de la réalité augmentée. Il y a là un défi de société. Il faut dès à présent développer de nouvelles compétences, afin de pouvoir mettre la technologie au service du business, mais aussi d’adapter la force de travail actuelle. Il est essentiel de donner à la population de réelles perspectives dans un monde toujours plus digital. »

Accompagner l’évolution des compétences

Car les compétences utiles aujourd’hui ne seront pas forcément celles dont on aura besoin demain. « Dans un avenir proche, on arrêtera de produire des véhicules à explosion. Or, ceux qui les fabriquent n’ont pas forcément les compétences nécessaires à la production des voitures électriques. Il faut donc se demander, dès à présent, comment accompagner la transition, pour que ces compétences que l’on sait bientôt obsolètes puissent évoluer… », poursuit Christian Scharff. Ne fut-ce que pour l’industrie automobile, on parle de 100.000 salariés dont les compétences vont devoir évoluer dans un horizon de 5 à 20 ans. Il est clé d’anticiper les besoins à venir si l’on veut éviter des situations de licenciements massifs de personnes obsolètes au profit d’autres que l’on aura toutes les peines du monde à trouver.

Anticiper les besoins

« Et le vrai sujet, au-delà de la transformation, c’est la vitesse à laquelle elle s’opère. Tout s’accélère et il y a fort à parier que, à l’avenir, les besoins en compétences évolueront plus vite, poursuit Christian Scharff. Au niveau des organisations, il faut pouvoir adapter les procédures de recrutement, mais aussi la manière d’accompagner l’évolution des talents. »

La difficulté réside dans le fait que les organisations ont du mal à définir les compétences qui seront nécessaires à leur développement. Et quand bien même elles parviennent à définir les contours de leurs besoins futurs, rares sont celles qui peuvent faire un état des lieux exhaustif des compétences dont elles disposent aujourd’hui. « Si les acteurs parviennent à définir un objectif, ils ne connaissent pas le point de départ. Difficile, dès lors, de définir le plan permettant de faire évoluer les compétences de manière adéquate », explique Christian Scharff. Le chantier est considérable, notamment pour les équipes en charge de la gestion des ressources humaines. « Le problème est que, au Luxembourg, la fonction RH reste encore trop administrative parfois. Pour relever les défis à venir, il faut qu’elle se positionne aux côtés du business, qu’elle œuvre sur un axe stratégique. »

De nouveaux modèles pour la formation continue

Pour relever les défis de demain, il faudra aussi reconsidérer la manière dont est  appréhendée la formation continue. « On ne parle plus d’ajustement ou d’acquisition de compétences à la marge. La transformation à opérer n’a rien de cosmétique. On parle d’apprendre un nouveau métier en milieu de carrière. Cinq à sept jours répartis sur l’année ne suffiront pas », assure Christian Scharff, qui préconise que l’on réfléchisse sans attendre à des nouveaux modes de financement de la formation continue. « Il faut plus de moyens pour permettre à chacun d’adapter ses qualifications, indépendamment de tout employeur, tout au long de sa carrière. Il faut responsabiliser le salarié vis-à-vis de son avenir professionnel en mettant tout en œuvre pour le garder dans l’emploi. » Pour l’associé de PwC Luxembourg, il y a urgence. « Il y a encore, aujourd’hui, une fenêtre d’opportunités pour envisager ensemble un nouveau modèle, pouvoirs publics, syndicats et employeurs. Il faut mettre en œuvre un cadre qui donne de réelles perspectives à tout le monde, en ayant conscience que cette fenêtre d’opportunités se réduit rapidement », conclut-il.

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