TECH NEWS
Créer les bureaux de demain
Alors que le monde se prépare à passer d'un travail à distance généralisé vers un retour au bureau, force est de constater que notre façon de vivre et de travailler a été bouleversée au cours de l’année écoulée. Ainsi, comment s’esquisse l’environnement de travail idéal de demain ?
May 10, 2021
L’essor des bureaux en open space
Au cours des deux premières décennies de ce siècle, les bureaux privés, symboles dépassés de la hiérarchie des entreprises, ont été éliminés. Les espaces de bureaux ouverts sont devenus une tendance que de nombreuses entreprises ont adoptée. L’idée étant de créer un environnement où l’on pouvait innover, en stimulant la créativité et la collaboration. Pour reprendre les mots de Steve Jobs : “Les idées ne naissent pas dans les salles de réunion, mais dans les couloirs”. Faciliter les micro-réunions et les discussions spontanées est la caractéristique d’un lieu de travail productif. La collaboration est plus naturelle sur un lieu de travail où il n’y a pas de barrières.
Aujourd’hui, des études montrent toutefois que, s’ils ne sont pas bien conçus, ces environnements ouverts peuvent avoir l’effet inverse et entraîner une baisse de la productivité, une augmentation des niveaux de stress et une baisse du moral des employés. Les employés ont le sentiment d’être toujours exposés et ressentent le besoin d’avoir l’air occupé. Pour faire face aux délimitations restreintes et aux distractions accrues, les gens doivent devenir sourds de manière sélective ou porter des casques antibruit pour se concentrer, et les collègues sont donc réticents à les interrompre. Les espaces ouverts semblent déclencher le retrait social. Lorsque les entreprises sont passées des bureaux fermés aux bureaux ouverts, les interactions en face à face ont diminué de 70 %, tandis que les interactions électroniques par e-mail et messagerie instantanée ont augmenté pour compenser. (“The Impact of the ‘Open’ Workspace on Human Collaboration”, Royal Society, juillet 2018).
Introduire des modèles de travail flexibles
Ces dernières années, de nombreuses entreprises ont repensé les open spaces pour passer d’une simple coprésence à un design permettant un mouvement continu entre collaboration et travail individuel, amélioré par la technologie numérique. Les espaces de travail reflètent de plus en plus des environnements qui ressemblent à ceux que l’on trouve à la maison, où les gens se retrouvent et passent du temps entre eux. Les nouveaux espaces ouverts englobent les zones de repos, les cuisines, les espaces de réunion et les postes de travail, qui doivent tous être connectés de manière transparente.
Bien avant la pandémie, de nombreuses entreprises avaient déjà adopté une combinaison entre l’environnement de travail classique et de celui du travail virtuel, en investissant dans des technologies de pointe fondées sur l’automatisation, l’IA et les data. Ces modèles de travail flexibles, optimisés par le numérique, ont permis de passer du jour au lendemain au travail à distance, qui est devenu la norme depuis le premier trimestre de 2020. À l’inverse, les entreprises qui ne sont pas équipées des capacités, de la mentalité et de l’expertise numériques ont eu du mal à mettre en œuvre un modèle de travail plus flexible. Ainsi, il apparaît que 68 % des entreprises ont accéléré, lancé ou planifié des initiatives de transformation numérique en réponse au COVID-19 (Institut de recherche Capgemini, Fast-Forward to the future).
Concevoir le bureau de demain
Alors que les entreprises se préparent à faire face à la réalité post-pandémie, la question est de savoir quelle sera l’influence à long terme de la pandémie sur notre façon de travailler. Quelles leçons avons-nous tirées qui peuvent aider à construire un environnement de travail sain, productif et collaboratif ?
L’expérience acquise au cours de l’année écoulée nous a appris que les employés sont plus productifs dans un environnement où ils peuvent se concentrer sans être interrompus, mais qu’ils sont néanmoins inquiets à l’idée de travailler à distance sur le long terme. Par exemple, les enquêtes montrent que 56 % des employés craignent la pression de devoir être “constamment connectés”. En même temps, le manque de connexions interpersonnelles entraîne un sentiment de déconnexion de l’organisation. (Institut de recherche Capgemini, enquête sur la main-d’œuvre à distance septembre – octobre 2020). Cela a un impact sur leur implication et à terme également sur leur productivité.
Lorsque les entreprises réfléchissent à leur futur environnement de travail, elles doivent impérativement continuer à permettre et à encourager les gens à se rencontrer, à collaborer, à innover et à se sociabiliser. L’organisation du futur est construite sur un modèle hybride, trouvant un équilibre entre le travail à distance et la présence au bureau. L’architecture de l’espace de travail doit être conçue de manière à ce que les équipes puissent se réunir et tirer profit de l’énergie de chacun, et non simplement être coprésentes. Cela implique de mettre l’accent sur des interactions particulières entre des individus et des équipes spécifiques (événements tels que des ateliers internes, des hackathons ou des cocktails d’équipe de projet).
La configuration parfaite, fondée sur une combinaison d’environnements physiques et numériques, dépend largement des besoins de l’entreprise. L’objectif est d’interagir à juste dose et de créer une énergie propice à la créativité et à l’innovation, ainsi qu’à la motivation de la communauté de travail. Il est extrêmement important que les entreprises fournissent à leurs employés la meilleure formation numérique disponible et les meilleurs outils de collaboration, et qu’elles entretiennent un dialogue ouvert avec eux. Mettre en place un suivi en temps réel et une analyse des personnes, de l’immobilier et des travailleurs à distance peut aider à atteindre cet objectif.
Un leadership qui encourage l’autonomie, l’empathie et la transparence
Les responsables doivent déterminer quelles activités et quels comportements collectifs sont nécessaires et quand la présence physique de leurs équipes est requise. Par exemple, il est préférable de discuter d’une réorganisation d’équipe lors d’une réunion en face à face avec les personnes concernées, afin de permettre une interaction et de comprendre les préoccupations. D’autre part, les dirigeants doivent également créer un environnement dans lequel les employés sentent qu’ils ont la permission de socialiser et d’interagir, et qu’ils ne sont pas obligés d’avoir “l’air occupé” au bureau pour impressionner le patron. Revenir au bureau pour faire principalement du travail individuel et des réunions serait ignorer les précieuses leçons que la pandémie nous a enseignées.
Un autre point d’attention pour les entreprises qui envisagent de redéfinir leurs politiques afin de permettre le travail à distance et de réduire le temps passé au bureau est de s’assurer que les managers montrent l’exemple. Ils doivent tenir compte des personnes qui ne sont pas dans la pièce et qui peuvent se sentir exclues. Il faut se méfier d’une situation dans laquelle un comité de dirigeants est continuellement présent dans un espace de bureau réduit, pendant que de nombreux employés travaillent à distance. Cela nous ramènerait à une hiérarchie d’entreprise “à l’ancienne” qui aurait un impact direct sur la satisfaction et la motivation des employés.
À la lumière des précieuses leçons apprises au cours de l’année écoulée, les organisations, lorsqu’elles créeront leur bureau de demain, s’appuieront sur trois principes : la personnalisation pour capitaliser sur la force collective, l’augmentation par le biais des nouvelles technologies et la bonne gestion pour encourager les connexions. La façon dont vous interagissez est tout aussi importante que la technologie que vous utilisez pour le faire.
Auteurs : Damien Stulemeijer et Evi Peerters – Capgemini Invent