Mathieu Perrein, Software Solutions Manager – Ainos

Depuis quelques années, l’Intelligence Artificielle (IA) s’infuse lentement dans notre quotidien, parfois même sans que l’on en ait conscience. Nos voitures, nos téléphones mobiles, nos logiciels, nos appareils ménagers, le milieu médical… et jusqu’aux présentateurs TV virtuels[1] ! Qui n’a jamais utilisé un service de traduction en ligne ou un assistant virtuel sur son téléphone mobile ? Tout devient plus intelligent et plus pertinent dans nos usages. Malgré tout, le terme d’Intelligence Artificielle pour le grand public est souvent attribué à tort à des « IA fortes », c’est-à-dire à des intelligences ayant conscience de soi. Les films hollywoodiens, tels que ceux où Arnold Schwarzenegger en est le protagoniste, n’y sont pas étrangers. Il faut bien sûr garder à l’esprit qu’une éthique est nécessaire car tôt ou tard nous pourrons tendre vers des « IA fortes ». D’ailleurs ce problème de l’éthique reste le même avec une « IA faible », qui n’a pas de « conscience » et sur laquelle nous avons du contrôle. Quelle décision devra prendre une voiture autonome qui aura le choix entre écraser un piéton ou tuer ses passagers ? Est-ce que l’homme pourrait être considéré comme un danger par l’IA ?

Ces questions, même si certaines peuvent paraître avant-gardistes, sont pleines de bon sens et soulèvent de nombreuses d’interrogations. L’éthique dans ce domaine[2] est entourée d’une aura très forte et est l’un des centres névralgiques de l’IA. Stephen Hawking disait : « La création de l’intelligence artificielle serait le plus grand événement de l’histoire de l’humanité. Mais il pourrait aussi être l’ultime. ». Nous devons considérer l’IA comme étant un prolongement de l’intelligence humaine vers la machine. Non pas pour remplacer les humains mais pour compléter ce que les humains savent faire et dont les tâches sont chronophages.
Il faut le reconnaitre, même si l’engouement des entreprises et des consommateurs est là et malgré les éternels réticents, nous sommes bien loin aujourd’hui de l’image cinématographique de l’Intelligence Artificielle. La technologie actuelle se place plutôt dans ce qu’on appelle des « IA faibles », mais il est bon de noter que ses capacités sont déjà réellement bluffantes.

Pourtant le concept d’Intelligence Artificielle n’est pas récent. Pour le définir, c’est un ensemble de théories et de techniques développant des programmes informatiques capables de simuler les traits de l’intelligence humaine. Le mathématicien Alan Turing définit l’intelligence artificielle en 1950par « Les principales composantes d’un système d’IA doivent être la connaissance, le raisonnement, la compréhension du langage naturel et l’apprentissage». La naissance de l’idée d’un « cerveau virtuel » date des années 50 de même que le concept des réseaux de neurones, bien connu dans ce que l’on appelle Machine Learning et Deep Learning. C’est aussi en 1950, qu’Alan Turing publie un article dans lequel il spécule sur la possibilité de créer des machines dotées d’intelligence, mais cette idée d’intelligence étant difficile à conceptualiser, il imagine alors son célèbre Test de Turing : si une machine peut réaliser une conversation avec un humain sans qu’il ne puisse identifier qu’il parle à une machine, alors le test est réussi. D’ailleurs le premier test de Turing réussi est celui du ChatBot Eliza au milieu des années 60, bien loin des possibilités de nos technologies actuelles.

Les concepts de base de l’Intelligence Artificielle ne sont donc pas nouveaux, mais tout cela n’a pu prendre réellement son envol que depuis une dizaine années. Avec la puissance de calcul, les capacités de stockage, Internet et l’utilisation massive de données, l’Intelligence Artificielle devient aujourd’hui concrète et accessible. En se nourrissant massivement des données, l’IA est en perpétuel apprentissage et parvient à se perfectionner. Nous arrivons à des Intelligences capables d’apprendre, presque seules, à écouter, à voir, à énoncer et à interpréter les besoins des utilisateurs ou des données sur lesquels nous voulons faire ressortir certaines prédictions, notamment grâce au Machine Learning ou au Deep Learning. Bien sûr, l’IA ne peut pas créer ou interpréter nos besoins sans qu’on ne le lui ait appris auparavant. On pourrait la comparer à un « nouveau-né » à qui on va apprendre des choses au fur et à mesure qu’il grandit.

Certaines IA vont jusqu’à faire preuve de créativité, comme avec le projet de recherche The Next Rembrandt[3] où un « nouveau » tableau de Rembrandt a pu voir le jour en 2016, plus de quatre siècles après la mort du peintre. Le résultat est plutôt impressionnant et montre que les enjeux sont nombreux et que les possibilités n’ont quasiment aucune limite, si ce n’est la puissance des machines d’aujourd’hui.

Il est vrai que la plupart de ces Intelligences Artificielles paraissent intouchables : elles ne sont pas à la portée de tous et peuvent être mises au rang de prouesse technologique. Il est nécessaire de faire appel à de nombreuses compétences : des chercheurs, des data scientists, des développeurs ayant des connaissances approfondies en mathématiques et dans l’IA, des spécialistes en IA, des mathématiciens, etc. Tout cet arsenal permet de construire des Intelligences de A à Z, mais ce n’est pas à la portée de toutes les entreprises.

C’est pour cela que l’IA est devenue le fer de lance chez les plus gros éditeurs et géants du web : chacun s’engage dans ce nouvel Eldorado et proposent des services innovants autours de ces nouveaux enjeux. Ils permettent aux consommateurs d’être au cœur de leurs produits et des services sur lesquels des développeurs tiers – n’ayant pas forcément de connaissances en IA – peuvent se brancher. Grâce à leur base de connaissance étoffée et à jour, ils mettent l’innovation à disposition des entreprises. Ces services se basent massivement sur le Cloud et sont consommés facilement pour tous types de développeurs, quelle que soit leur spécialité. Cette facilité à utiliser de l’IA permet à n’importe quelle société, de la plus petite à la plus grande, d’infuser leurs applications avec de l’intelligence artificielle.
Car il vaut mieux être précurseur que suiveur, la percée de l’IA est là et c’est maintenant qu’il faut prendre le virage afin d’être prêt pour l’avenir. L’innovation reste la valeur sûre car les concurrents, eux, évolueront à coup sûr.

L’IA est déjà très répandue dans les produits grand public ; avec l’émergence des voitures autonomes, des radios réveils connectés et intelligents, des téléphones capables de nous reconnaitre, etc. Ces usages sont quotidiens et sont devenus courants.
Mais, dans nos entreprises, que pouvons-nous faire de concret avec de l’intelligence artificielle dans nos processus métiers ? Les cas d’utilisation sont nombreux et peuvent être utilisés dans n’importe quel type de métier. Par exemple, dans l’assurance-vie, l’assureur peut mieux prédire et mieux maitriser les risques : en analysant les tendances, il est possible de définir de nouveaux profils à risques et créer de nouveaux produits d’assurance. Dans les banques également, simplifier les tâches chronophages des conseillers et améliorer leurs performances. Cela peut passer par des ChatBots qui, depuis début 2018[4], sont en train de révolutionner la relation client en personnalisant l’expérience utilisateur. Ceux-ci n’ont d’ailleurs aucune limite dans les domaines où ils sont utilisés, ils peuvent être mis en place partout : RH, e-commerce, banques, etc. Ils simplifient et permettent à n’importe quel moment d’avoir de l’information, en langage naturel écrit ou parlé et via différents canaux comme WhatsApp, Facebook Messenger, etc. C’est d’ailleurs sous cette forme que l’on peut trouver certains pré-entretiens d’embauche en ligne[5], jusqu’à avoir une DRH virtuelle[6].
Beaucoup de startups se sont d’ailleurs spécialisées dans ces domaines. Même si l’apprentissage d’une IA peut être longue et les prédictions pas toujours précises au début, il faut se lancer. C’est grâce à l’apprentissage qu’au fur et à mesure nous arrivons à faire des intelligences capables de réellement apporter de la plus-value dans nos processus métier. Tout est perfectible, mais si nous attendons la perfection, aucun des objets et services que nous voyons aujourd’hui n’aurait pu voir le jour.
Même si certaines entreprises prennent à peine le virage de la Transformation Digitale, elles doivent intégrer l’IA rapidement dans leur stratégie d’entreprise.

La révolution digitale est en marche. Qui aurait pu imaginer au temps d’Henry Ford que plus d’un siècle plus tard, la robotisation aurait pris place dans les usines en remplacement des humains pour augmenter la production ? Ici, nous pouvons légitimement nous poser les mêmes questions. Il n’est pas prévisible de savoir à quoi ressemblera le futur.
Nous sommes à l’aube d’une formidable révolution industrielle où les usages du quotidien seront tous infusés, tels que l’électricité, par de l’Intelligence Artificielle. Chaque objet peut user de l’IA pour se perfectionner et s’adapter à l’utilisateur, pour lui offrir une expérience unique et ajustée à ses besoins.
Le prolongement de l’intelligence humaine vers la machine est bien en cours et se nourri chaque jour des données qu’on lui donne à traiter. L’avenir ne s’écrit pas à l’avance, mais cependant, c’est à nous et dès aujourd’hui de le construire.

Pour conclure, comme l’avait dit Yann LeCun, l’un des inventeurs du Deep Learning «nous allons vite nous apercevoir que l’intelligence humaine est limitée».

 

[1]http://www.lefigaro.fr/medias/2018/11/09/20004-20181109ARTFIG00265-le-premier-presentateur-de-television-virtuel-est-ne.php

[2]https://philpapers.org/browse/ethics-of-artificial-intelligence/

[3]https://www.nextrembrandt.com/

[4]https://chatbotsmagazine.com/chatbot-report-2018-global-trends-and-analysis-4d8bbe4d924b

[5]http://blog.livingactor.com/fr/chatbot-service-rh-usages/

[6]https://bfmbusiness.bfmtv.com/emploi/ikea-et-l-oreal-utilisent-cette-drh-virtuelle-pour-faire-passer-des-entretiens-de-recrutement-1411303.html