Une école de coding pour réussir la transformation digitale de l’économie

Le Luxembourg a besoin de son école de coding. Depuis l’annonce de l’initiative Digital Lëtzebuerg, la problématique e-Skills revient régulièrement au cœur des discussions. Laurent Probst, Directeur de l’Accelerator de PwC, revient sur les enjeux et besoins en matière de compétences, afin de faire entrer le Luxembourg dans l’ère de l’économie digitale. En attendant l’annonce d’une première initiative devant combler un manque...

December 3, 2015

Le Luxembourg a besoin de son école de coding. Depuis l’annonce de l’initiative Digital Lëtzebuerg, la problématique e-Skills revient régulièrement au cœur des discussions. Laurent Probst, Directeur de l’Accelerator de PwC, revient sur les enjeux et besoins en matière de compétences, afin de faire entrer le Luxembourg dans l’ère de l’économie digitale. En attendant l’annonce d’une première initiative devant combler un manque…

Par Sébastien Lambotte pour l’édition ITnation Mag Octobre 2015

« Pour entrer pleinement dans l’ère digitale, créer de la valeur et profiter d’opportunités nouvelles liées aux évolutions technologiques, la Place a besoin de compétences digitales, et ce à trois niveaux différents », commente Laurent Probst, directeur de l’Accelerator de PwC et associé du cabinet de conseil au Luxembourg. En effet, d’après les travaux menés par le Strategic Policy Forum de la Commission Européenne, ce besoin en compétences à 3 niveaux représente l’obstacle principal à cette transformation.

« Il nous faut des personnes capables de comprendre les nouveaux enjeux, de mettre en place des stratégies digitales et de les traduire en actions concrètes. »

1 • Développer un leadership digital

Pour s’inscrire durablement dans l’économie digitale, il faut avant tout un leadership digital. « Ce niveau de besoin concerne les autorités publiques comme les leaders économiques. Il nous faut des personnes capables de comprendre les enjeux, de mettre en place des stratégies digitales et de les traduire en actions concrètes », commente Laurent Probst. On parle, en la matière, de digital entrepreneurship, nécessaire à la transformation de l’économie à partir de la technologie.

« La principale barrière pour y parvenir est celle de la compétence », poursuit Laurent Probst. Selon une étude, seulement 19% des leaders disposent de réelles com- pétences à la fois dans les domaines du digital et en management. 47% ne disposent que de compétences parcellaires en la matière. Pour les 34% restants, elles sont insuffisantes. « Nous assistons à une révolution technologique. Il faut pouvoir en appréhender les enjeux, parvenir à comprendre les conséquences de l’émergence d’une technologie sur un marché, leur impact sur la législation ou sur un business model », précise l’associé de PwC.

2 • Des ingénieurs « digital aware »

Pour répondre à ces nouveaux besoins, il faudra aussi s’appuyer sur des ingénieurs spécialisés dans des domaines spécifiques, en Big Data, en Analytics ou encore en sécurité IT, pour ne citer que quelques exemples. « Ces profils, actuellement, sont trop rares. Ils sont cependant nécessaires pour traduire les stratégies digitales, pour intégrer les technologies au cœur des entreprises, dans les processus, commente Laurent Probst. Au sein du middle management, il faut pouvoir disposer de profils hybrides, à la fois techniques et managériaux. Face à la pénurie, dans la mesure où il deviendra de plus en plus difficile d’attirer des compétences venues de l’extérieur, nous n’avons pas d’autre choix que de les former. »

3 • Des techniciens, professionnels du code

Dans une économie digitale, applicatifs et processus s’appuieront de plus en plus sur des systèmes d’information. La relation client et l’accès aux services passeront par une multitude de canaux, et principalement des plateformes web ou mobiles. « Les entreprises ont besoin de techniciens capables de programmer de nouvelles applications dans différents types de langages, ajoute Laurent Probst. Plus que des ingénieurs, les entreprises auront besoin d’un grand nombre de techniciens, capables de développer des applications et des fonctionnalités, ou encore de les tester. »

Une lacune à combler

C’est donc tout au long de la chaîne qu’il faut développer des compétences digitales. Le besoin s’exprime déjà clai- rement. Le manque, lui, est criant. « En Europe, 40% de la population, soit 32% de la force de travail, dispose de compétences digitales jugées comme insuffisantes, alors que 22%, respectivement 13% de la force de travail, n’en disposent pas du tout. C’est beaucoup, commente Laurent Probst. Le problème n’est pas luxembourgeois, mais européen. Si nous voulons relever les ambitions luxembourgeoises en matière de développement d’une société digitale, il fau- dra combler cette lacune. Toutes les sociétés technologiques qui s’installent au Luxembourg seront tôt ou tard amenées à recruter des ingénieurs ou des développeurs. En ne disposant pas des ressources et des compé- tences répondant à leurs besoins, on passe à côté d’opportunités. »

En outre, si les sociétés technologiques sont les premières à exprimer ce besoin, demain, toute PME cherchera à recruter de telles compétences.

Un effort urgent et majeur

Si l’on aborde la question sous l’angle du risk killing workforce, l’urgence se fait plus grande encore. Selon une étude du Dr Michael A. Osborne, de l’Université d’Oxford, entre 40 et 50% de la force de travail actuelle sur le marché US serait menacée par la digitalisation… Dès lors, faut-il encourager le développement de l’économie digitale quand on sait qu’elle risque de mettre la moitié des travail- leurs sur la touche ? Cruel dilemme.

En réalité, la question ne doit pas être envisagée selon un tel clivage. L’Europe ne peut pas se permettre de rater le tournant du digital. Elle risquerait de se retrouver au ban des économies compétitives. Ce qui ne serait pas sans conséquences sur l’emploi à plus long terme. « Il y a donc un effort majeur à réaliser, dès à présent, en matière d’évolution des compétences. Et nous ne pouvons pas nous permettre d’attendre que des étudiants en- tamant une formation supérieure finissent un cycle de cinq ans. Il y a urgence. Le besoin est tel que tout le monde doit s’y mettre, du fondamental à l’Université, en passant par la formation professionnelle continue. »

« Toutes
les sociétés technologiques qui s’installent au Luxembourg seront tôt ou tard amenées à recruter
des ingénieurs ou des développeurs. »

Des initiatives nationales voient le jour – l’exemple français

Le Président français a lancé le 17 septembre la grande école du numérique visant à former plusieurs milliers de programmeurs en collaboration avec le secteur privé et social visant différentes catégories de personnes et de fonctions. Une revue complète du panorama des formations et compétences requises au vu des besoins des entreprises revêt une grande importance.

Une école de coding luxembourgeoise ?

Webforce 3 ouvrait ses portes lundi au Technoport pour accueillir ses premiers volontaires. Créée à Paris par Alain Assouline, la WebForce3 délivre une formation de 4 mois au métier de développeur web et mobile. Laurent Probst apporte tout son soutien à cette initiative et aux candidats sélectionnés par l’ADEM. Après l’ouverture d’une antenne à Pienne (Meurthe et moselle) en novembre, WebForce3 était très attendue au Luxembourg.

Les premières sessions de la WebForce3 ont débuté dans des locaux situés à Paris, au 18, rue Geoffroy l’Asnier dans le 4ème arrondissement. Ces locaux sont situés en plein cœur du Marais, au sein de la Cité Internationale des Arts. Cette première école dans le 4e arrondissement de Paris a débuté le 13 janvier 2014. Une deuxième école a ouvert ses portes dans le 10e arrondissement, aux Ekluz, le 20 octobre 2014. Un grand succès que l’on souhaite voir se dupliquer au Luxembourg.

 

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