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« Je suis toujours impressionnée par notre capacité à nous adapter »

Elle est le visage du restaurant Um Plateau sur les hauteurs des rives de Clausen, de l’établissement Tempo adjoint à la Philharmonie et de l’enseigne nationale Cocottes... À 48 ans, Stéphanie Jauquet est ce que l’on appelle une cheffe d’entreprise accomplie. Le temps d’un afterwork, elle évoque avec nous, dans une ambiance décontractée, son évolution, le développement de ses activités et la transformation de son métier, notamment dans le contexte de la crise sanitaire actuelle.

December 9, 2020

C’est en faisant du baby-sitting, alors qu’elle était adolescente, que Stéphanie Jauquet s’est découvert une passion pour la cuisine. « Nous habitions juste à côté d’un hôtel-restaurant gastronomique, en Belgique, se souvient-elle. Je gardais le petit garçon des propriétaires. Au fil des années, j’ai délaissé le baby-sitting pour rejoindre ma meilleure amie qui, elle, faisait la plonge dans le restaurant. J’ai aussi appris à travailler en salle et en cuisine. Et ça m’a tout de suite plu. » Week-ends, jours fériés, congés scolaires : Stéphanie passe tout son temps libre dans cet établissement.

Ambition concrétisée

À 18 ans, la jeune femme entame des études en sciences commerciales à Liège, mais elle finit par se réorienter vers ce qu’elle aime, vraiment. Elle rejoint alors l’école hôtelière de Namur. « Mes parents n’étaient guère emballés par ce choix… Je leur ai dit qu’un jour, j’aurais mon propre restaurant. » Est-ce cet engagement qui a mené Stéphanie Jauquet là où elle est aujourd’hui ? Le challenge, en tout cas, a bel et bien été relevé.

Son diplôme en poche, Stéphanie débarque au Luxembourg en 1997. Pendant une dizaine d’années, elle travaille pour différents établissements, avant de créer son restaurant. Et puis, tout s’enchaîne. En 2008, elle reprend Um Plateau. En 2014, l’enseigne Cocottes – qui compte aujourd’hui 12 boutiques à travers le pays – voit le jour. Deux ans plus tard, elle prend les rênes du restaurant de la Philharmonie, sous le nom de Tempo. L’an dernier, un tout nouvel atelier de production est inauguré à Grass.

Le challenge du personnel

En 20 ans, Stéphanie a bien sûr vu le secteur de la restauration évoluer. « Ce ne sont pas tellement les attentes des clients qui ont changé, mais davantage celles des employés, analyse-t-elle. Quand j’ai commencé, on travaillait jusqu’à 60h par semaine sans problème dans l’Horeca. Nous n’avions pas de difficultés à trouver du personnel. Aujourd’hui, c’est beaucoup plus compliqué. Le métier est pénible, contraignant, fatiguant. Les horaires sont ingrats. C’est un job de forçat et les gens n’en veulent plus. Même les grandes maisons peinent à recruter. »

Pour trouver des collaborateurs, il est essentiel de rendre les salaires plus attractifs. « Il faut mieux valoriser ces métiers, notamment en revoyant leur rémunération. On pourrait aussi envisager de mettre en place deux tournées, pour proposer des horaires plus continus. Mais cela implique d’avoir une double équipe et le client n’est pas prêt à débourser plus pour compenser ces frais. »

Rebondir en temps de crise

En 20 ans, Stéphanie a aussi été confrontée à de nombreux défis. La crise sanitaire que nous traversons actuellement est certainement l’un des plus importants d’entre eux. « C’est une période qui a été très difficile, et qui continue à l’être, même si le plus dur est passé, confie la cheffe d’entreprise. Lors de l’annonce du confinement, ça a été le coup de massue. Nos deux restaurants ont dû fermer leurs portes. Heureusement, avec Cocottes, nous avons pu rester en activité. Nous n’avions cependant aucune vision sur l’avenir, nous étions pendus aux lèvres du gouvernement, la situation évoluait presque d’heure en heure, ce qui était source de beaucoup de stress et, moralement, très épuisant. Au-delà de l’aspect purement économique, j’étais aussi inquiète pour mes collaborateurs. Que chacun soit en bonne santé et que personne ne doive être licencié, c’était pour moi l’essentiel. »

On le sait, le secteur de la restauration est l’un des plus affectés par la pandémie du Covid-19. Stéphanie est toutefois loin de se laisser abattre. « Tout le monde est dans le même bateau, nous n’avons pas d’autre choix que de rebondir. Je suis toujours impressionnée par la capacité de l’être humain à s’adapter. » Pendant le confinement, Cocottes a ainsi continué à fonctionner et s’est transformé, pour mieux répondre aux besoins du moment. De nouveaux services, comme la livraison à domicile et le pick-up, ont été développés. « Nous nous sommes bougés, nous avons matraqué les réseaux sociaux, notamment pour nous faire davantage connaître en tant que traiteur. Nous avons ainsi acquis une nouvelle clientèle qui, je pense, va rester. Il y a aussi du positif. »

De nouveaux projets et du temps pour soi

Le coronavirus n’a pas freiné les projets de Stéphanie Jauquet. « J’ai la chance d’avoir une entreprise pérenne, et la confiance des banques », souligne-t-elle. Une treizième boutique Cocottes va bientôt s’installer dans le quartier de Merl. « J’ai aussi toujours le souhait d’ouvrir une friterie au printemps prochain, quelque chose de nouveau, à la belge, décalé. J’aime créer des lieux, réfléchir à des concepts qui sortent de l’ordinaire. » 

Et puis bien sûr, viendra le temps de souffler un peu. « Cocottes a six ans, la croissance de l’enseigne a été très rapide. Aujourd’hui, j’aimerais aussi arriver à prendre un peu de temps pour moi et profiter. »

ENCADRÉ

[toggle title =”Autour d’un verre“] Qu’est-ce que vous prenez ?

Un bon verre de vin rouge. Ou bien une Suze, j’adore cet apéritif ancien, au goût amer. 

À qui aimeriez-vous payer un verre ? Pourquoi ?

Je dirais Banksy ! Avec ses œuvres décalées, il veut toujours créer la surprise. J’aime les gens qui vont à contre-courant.

Votre plat préféré ?

Assurément une sole meunière, avec des pommes de terre nature, comme on la sert à Um Plateau. C’est une recette familiale de ma grand-mère Marguerite. C’est elle qui m’a donné le goût de la bonne cuisine. En dégustant ce plat, je revis plein de bons souvenirs. 

Votre truc pour décompresser ?

Passer la frontière, aller à l’étranger, voyager. Et bien sûr, goûter à la gastronomie locale ![/toggle]

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