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Afterwork with a CEO : Carole Muller, Fischer
Dirigeante de l’enseigne Fischer, présidente de la Confédération du commerce, mère de famille… Carole Muller est engagée sur de nombreux fronts. Ce qui ne l’a pas empêchée de prendre un moment pour échanger avec nous.
July 22, 2025

AUTOUR D’UN VERRE
On vous offre un verre , que prenez-vous ?
Un Coca, bien servi, avec des glaçons. C’est ma boisson fétiche.
Avec qui aimeriez-vous partager un verre ?
Il y en a tellement que c’est difficile de choisir. J’ai des modèles, bien sûr. Mais de manière générale, j’ai de l’intérêt pour chacun. En fait, il y a peu de personnes avec lesquelles je refuserais de prendre un verre.
Quel est votre truc pour décompresser en fin de semaine ?
La course à pied ou un moment partagé avec ma famille et des amis.
Une destination pour souffler ?
Quand je suis au Luxembourg, c’est le lac d’Esch-sur-Sûre. Pour déconnecter à l’étranger, je privilégie une virée à la mer.
L’enseigne Fischer fait partie d’un groupe familial plus vaste, constitué d’entreprises complémentaires.
Pouvez-vous nous rappeler comment il se compose ?
Le groupe familial est constitué de trois entreprises. Le Moulin, dirigé par mon frère Jean, est spécialisé dans la transformation de céréales en farine et semoule, ainsi que dans d’autres produits, comme la viande végétale.
À l’échelle du groupe, une part de cette production sert de matière première à Panelux. Dirigée par nos cousins Patrick Muller et Manou Emringer, l’entreprise exerce deux activités relativement différentes :
d’une part, la confection de pains, pâtisseries et viennoiseries fraîches ; d’autre part, la production d’une gamme de produits de boulangerie surgelés, dédiée à l’exportation. Enfin, Fischer, l’enseigne que je dirige, compte 65 points de vente au Luxembourg ainsi que 3 en France, et assure également un service historique de livraison « Porte-à-Porte ».
En termes d’emploi , que représente le groupe ?
L’ensemble de ces trois entités représente environ 1 200 collaborateurs.
En tant que dirigeante , vous êtes l’héritière d’une longue histoire …
La famille Muller évolue dans la transformation de la culture céréalière depuis 1704. Elle est à la tête des Moulins de Kleinbettingen depuis 1917. Les origines de l’enseigne Fischer, quant à elles, remontent à 1913.
C’est la rencontre des familles Muller et Fischer, dans les années 60, qui donnera naissance au groupe Panelux-Fischer quelques années plus tard. Notre développement s’articule autour d’un équilibre entre tradition et innovation.
Quels sont les grands enjeux inhérents au développement de l’activité ?
Le principal, c’est d’avoir les bonnes personnes aux bons postes.
Dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre, c’est un vrai défi. Pour l’entreprise, cela garantit l’efficience ; pour les collaborateurs, cela permet à chacun de s’épanouir dans sa fonction et de rester engagé. Un autre enjeu important réside dans la digitalisation de l’activité, en veillant à embarquer l’ensemble des collaborateurs dans cette transformation.
Cette transition numérique doit se faire avec les gens, et non contre les équipes. Tout évolue rapidement et il est essentiel de s’adapter, dans l’optique d’améliorer les processus, de mieux servir le client, de mieux maîtriser notre environnement. Les habitudes de consommation, notamment au Luxembourg, évoluent elles aussi rapidement. Il faut sans cesse se remettre en question, faire évoluer la gamme de produits, mais aussi l’expérience client.
Dans les métiers « traditionnels » que sont les vôtres , comment se traduit cette transformation digitale ?
Je vous rassure, il ne s’agit pas d’imprimer des croissants en 3D. Il s’agit plutôt de fluidifier les processus, d’utiliser les données pour garantir des commandes et une production au plus près des besoins. Aujourd’hui, le digital permet d’effectuer de meilleures prévisions. Il contribue aussi à faciliter le travail des équipes, depuis la gestion de la caisse en boutique jusqu’au suivi de l’approvisionnement. Si les outils numériques sont bien intégrés, tout devient plus simple. Vis-à-vis des équipes, parfois sceptiques face aux changements, il est essentiel de montrer que ces outils sont là pour rendre leur travail plus agréable et valorisant — et en aucun cas pour les remplacer. Chez Fischer, les équipes sont avant tout là pour servir les clients, pas pour remplir des formulaires de commande.
Cette transformation doit être bien accompagnée. Cela passe aussi par la formation.
La crise énergétique, liée au conflit en Ukraine, a particulièrement touché les entreprises artisanales et industrielles comme la vôtre. Comment l’avez-vous traversée ?
Nous avons en effet été doublement affectés, avec une forte hausse du prix du blé, d’une part, et de l’énergie, d’autre part.
L’énergie nécessaire à la production — pour le fonctionnement des fours — et à la conservation des produits, dans les frigos et congélateurs, est loin d’être négligeable. Le client ne s’en rend pas toujours compte. Dans ce contexte, le défi a été de continuer à travailler tout en maintenant nos marges, sans que cela n’affecte trop le client, en prenant à notre charge une partie de la hausse des prix.
Comment votre rapport à l’énergie a-t-il évolué ?
Je pense que cela a sensibilisé tout le monde. Cela a aussi renforcé l’engagement d’acteurs comme nous dans la transition énergétique. C’est un engagement qui dépasse la seule maîtrise des coûts : il s’agit aussi d’une contribution aux enjeux climatiques.
Concrètement, cela se traduit par des réflexions sur l’optimisation de nos besoins énergétiques, ainsi que par le développement d’installations de production renouvelable. Toutefois, cette transition implique des investissements importants et ne pourra se faire sans un soutien de l’État, à travers la mise en place d’un plan cohérent et de mesures d’aide aux entreprises.
C’est un autre aspect de votre engagement : la défense des intérêts des acteurs économiques du pays, en tant que présidente de la Confédération Luxembourgeoise du commerce. Qu ’est -ce qui vous anime ?
J’aime contribuer au changement, évoluer avec les clients, les équipes, notre époque. J’aime avant tout travailler avec les gens.
C’est dans l’échange et la réflexion collective que je fonctionne le mieux. Mon engagement, à la Confédération ou dans d’autres structures, est une manière de contribuer à la société, de rendre une partie de ce qui m’a été donné. Le défi, ici, est de mieux faire entendre les besoins des entreprises, de les expliquer, de les porter à la connaissance des autorités. La simplification administrative, par exemple, est un enjeu clé. On ne peut pas être productif si l’on passe 80 % de son temps à gérer de la paperasse plutôt qu’à servir le client. Il est important de faire valoir ces arguments. On ne peut pas faire évoluer les choses si les problèmes sont ignorés ou méconnus. Derrière chaque loi, il y a souvent une bonne intention, mais il faut aussi sensibiliser aux impacts concrets qu’elle induit.
Vous êtes entrepreneuse , présidente de la Confédération , administratrice de LuxConnect, et mère de famille.
Comment gérez-vous votre temps et vos priorités ? À quoi ressemble votre journée type ?
Elle ressemble sans doute à celle de n’importe quel CEO. Je prends le temps de m’occuper de mes enfants le matin.
Chaque jour, à 8 h, je suis dans l’entreprise, à travailler avec mes équipes et dans les filiales. Ensuite, mes journées varient selon mes engagements. Mon implication auprès de LuxConnect, par exemple, me permet de découvrir d’autres choses, de rencontrer des personnes issues d’autres horizons, et d’apporter mon point de vue au développement de cette activité spécifique. Chaque jour, je termine vers 18 h pour profiter de moments en famille, avant de reprendre le travail le soir.